vendredi 11 février 2011

Que l'inoubliable se pende

Photographie: Andrée-Anne Giguère

Élaine Juteau est la première a avoir présenté son projet de fin de bacc., Que l'inbouliable se pende... production qui sera de nouveau présentée ce soir et demain, à 20h, au Studio-théâtre de l'UQAC (encore trop souvent nommée salle de répétition...).

Axées sur la rupture et la quête de l'oubli, ces quelques cinquante minutes entremêlent avec sensibilité, audace et, disons-le, talent et une scène de Macbeth et des petites vidéos de Bonnie and Clyde maison et des chansons et le multimédia dans un enrobage simple (avec des objets hétéroclites) et efficace qui fait la part belle à l'éclatement de l'image et du sens. Juteau se lance dans un étrange dialogue où l'interlocuteur est absent et est remplacé par les collaborateurs de la comédienne, André-Anne Giguère et son projecteur et Nicolas Longpré et ses instruments de musique. La douleur, le désemparement, le déni se croisent, s'entrecroisent, dans les différents niveaux de jeux et d'actions pour donner une trame rhapsodique* forte qui s'empare peu à peu du spectateur.

Parce que oui, le spectateur doit, en quelques sortes, s'acclimater à la production de sens... pour jouir des multiples propositions qui surprennent, touchent et font réfléchir.

Un travail de fort bon calibre... où l'on sent la nouvelle tangente technique donnée depuis quelques années au département (?) de théâtre de l'UQAC.
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* Rhapsodie: [...] Selon le sens étymologique littéral - rhaptein signifie «coudre» - « coud ou ajuste des chants». [...] Assemblant ce qu'il a préalablement déchiré et dépiéçant aussitôt ce qu'il vient de lier -, la notion de rhapsodie apparaît donc d'emblée liée au domaine épique: celui des chants et de la narration homériques, en même temps qu'à des procédés d'écriture tels que le montage, l'hybridation, le rapiéçage, la choralité. [...] Les caractéristiques de la rhapsodie sont tout à la fois kaléidoscope des modes dramatique, épique, lyrique, retournement constant du haut et du bas, du tragique et du comique, assemblage de formes théâtrales et extra-théâtrales, formant la mosaïque d'une écriture en montage dynamique, percée d'une voix narratrice et questionnante, dédoublement d'un subjectivité tour à tour dramatique et épique. Il s'agit donc avant tout d'opérer un travail sur la forme théâtrale: décomposer-recomposer - comporene, c'est à la fois assembler et confronter -, selon un processus créateur qui envisage l'écriture dramatique dans son devenir. C'est alors précisément le statut hybride, voire monstrueux du texte produit - ces recouvrements successifs de l'écriture que synthétise la métaphore du «texte-tissu»-, qui caractérise la rhapsodisation du texte, permettant l'ouverture du champ théâtral à une troisième voie, c'est-à-dire à une autre «mode poétique», qui associe et dissocie tout à la fois l'épique et le dramatique. (Poétique du drame moderne et contemporain)

Pour aller plus loin...


Pour faire suite à la petite discussion par médias interposés d'hier, je tiens à souligner qu'il y a un fort bon papier d'Alexandre Cadieux, dans la dernière parution du Cahier Théâtre Jeu numéro 137 portant sur le même sujet (ou à peu près): La critique de théâtre : quel engagement pour quel milieu ?... où prennent la parole deux des plus influents critiques du Québec, Robert Lévesque et Jean Saint-Hilaire, de même que des blogueurs, des pigistes et des artisans. Le problème critique est loin d'être exclusif à notre région...