samedi 30 juin 2012

Un Théâtre 100 Masques nouveau?

C'est bientôt la fin de la saison pour le Théâtre 100 Masques... enfin, après une production, deux semaines de camps thématiques et une douzaine d'heures d'ateliers dans des terrains de jeux!

Une année riche en événements de toutes sortes (et fort occupée!) qui place maintenant la compagnie à une croisée des chemins. Cinq ans déjà que j'y occupe la fonction de directeur général et artistique. Cinq ans de travail à donner de solides assises à nos actions. Comment maintenir ce développement? Mieux encore, comment le surpasser? Comment (et sur quelles bases) reprendre un nouvel élan?

Il ne faut pas s'en cacher: ce métier use rapidement quiconque s'y frotte. Le financement - que ce soit par les dons, les commandites, les partenariats, les subventions, les activités bénéfices - occupe un temps fou... pour ne pas toujours donner les résultats escomptés. Comment alors se donner les outils nécessaires, consolider les acquis (souvent bien éphémères devant les coupes budgétaires) pour faire de cette aventure une aventure artistique au-delà de celui-ci?

Cinq ans, donc, à travailler d'arrache-pied mais ça en valait le coup. Et je le pense encore. C'était là, en quelque sorte, une période de (re)construction. Maintenant, il faut passer aux choses sérieuses.

Sans tout chambouler (parce que dans l'ensemble, ça va plutôt bien), il est peut-être temps, maintenant, de brasser les cartes. D'insuffler un nouveau dynamisme au sein de l'organisme. Tracer de nouvelles lignes. Cultiver et déployer de nouveaux projets. Mettre en place de nouvelles stratégies de communication, de promotion, de création... En somme, de l'air frais! Miser sur nos forces (il y en a!) et combler nos lacunes (toutes aussi nombreuses!).

Plusieurs scénarios ont été (et continueront) d'être envisagés au cours des prochaines semaines en vue de bonifier les cinq prochaines années! Plutôt stimulant...

Mais avant, encore un petit coup estival à donner!

vendredi 29 juin 2012

Les 15 ans du Théâtre C.R.I.

15 ans déjà! Voici la toute nouvelle vidéo faisant la promotion de cette année-aniversaire du Théâtre C.R.I. (avec extraits vidéos et photos), à Jonquière. La réalisation est d'Andrée-Anne Giguère.

jeudi 28 juin 2012

«La Marmite» [Carnet de production]

À quelque jours de la première, il reste quelques dossiers à finaliser: des détails de costumes à finir, des éléments de la scénographie à peaufiner, et une promotion à mettre en branle.

Pendant ce temps, les comédiennes et la metteure en scène sont entrées dans une série d'enchaînements qui culmineront, dans quelques jours, par les générales... elles aussi ajustant, détaillant, peaufinant leurs actions.


mercredi 27 juin 2012

«La Marmite» [Carnet de production]

Voici un premier aperçu d'un bout de la scénographie de La Marmite... La photo est d'Isabelle Boivin. Sur la scène, un immense dépotoir d'un côté... un hammam de l'autre! Le décalage entre les pauvres et les riches!  Un espace gigantesque...


(soupir)

En cette période estivale ou de nombreuses productions prendront l'affiche (j'en compte sept sur le territoire... sans compter tous les autres évènements qui sortent du cadre théâtral), la couverture médiatique de la chose culturelle régionale dévoile, à tout coup, ses nombreuses failles.

Alors que ça grouille, que ça fourmille partout, les journaux et la radio font une large part à la première (la seconde et les suivantes!) du film Omertà... avec une large part fait à Michel Côté qui, rappelons-le, vient de la région! Une couverture digne de revues à potins... (D'ailleurs, au moment même où j'écris, l'équipe de Café Boulot Dodo, à Radio-Canada, le reçoit...)

Quand l'intérêt pour ce film ce sera estompé, viendront assurément les grands spectacles... 


mardi 26 juin 2012

Les egos théâtraux...

 Sacha Guitry et Michel François, Théâtre du Gymnase, 1950

Je suis un fan de Sacha Guitry... et plus j'en lis, plus j'ai envie de remonter un autre de ses textes (après le Nono du Théâtre 100 Masques, en 2008). C'est un auteur avec de l'esprit. Vif. Doté d'une écriture souple. Et animé d'une véritable passion théâtrale... Une passion pour le mot juste, le quiproquo, la joute verbale, les personnages verbeux! Une passion enfin, pour un métier. Une vie pour la scène... À ce titre, ses deux plus belles pièces sur le théâtre, Le Comédien et Deburau, sont de très belles odes à l'art dramatique, sa pratique, ses egos!

Voici un extrait de cette dernière pièce (c'est la dernière que Guitry a jouée, en 1953)... alors que le fils, Charles Deburau, vient voir son père, comédien réputé pour la pantomime, pour lui apprendre qu'il veut suivre ses pas. Une rencontre qui ne se passe pas très bien:

Charles Deburau
Je crois que tu serais, papa, plus éloquent
Si tu vantais ses qualités.
Tu ne parviendras pas à me décourager.
Et tu n'effaceras jamais de ma mémoire
Les jours où je t'ai vu tout rayonnant de gloire
Revenant du théâtre après un grand succès.
Je n'oublierai jamais les mots que tu disais.
Tu disais: «Quel triomphe!» ou bien «Quelle victoire!»
Ou bien tout simplement: «Je suis assez content.»
[...]
Tout ce que tu peux dire aujourd'hui m'est égal,
Je t'ai vu glorieux!... Tu n'as jamais été,
Dis-tu, qu'un pitre, en vérité?
Ne te souviens-tu pas d'un grand jour triomphal
Où tu m'as même demandé mon avis sur toi-même?

Deburau
Ton avis?

Charles Deburau
Oui, papa. Tu m'as dit: «Toi qui m'aimes,
«Dis-moi la vérité.
«Comment ai-je joué ce soir?
«Ai-je été
«Bien?
«N'ai-je pas des défauts que l'on commence à voir,
«N'as-tu rien remarqué?» Je t'ai répondu: «Rien!»
Car je t'avais trouvé, comme toujours, superbe -
Et je t'ai dit que tu étais probablement
Le plus grand acteur de la terre! Et, souriant,
Tu m'as dit: «Pourquoi cet adverbe?
«Pourquoi le mot probablement?»
Pourtant, tu insistais, tu me disais: «Dis-moi
«Sincèrement comment, toi, tu m'as trouvé, toi!»
Tu semblais implorer de moi quelque critique,
Tu répétais: «Je t'en supplie, allons, dis-moi
«Si quelque chose dans mon jeu, dans mon physique
«Était moins bien ce soir... ça me rendrait service...
«Un mouvement de moi t'a-t-il semblé factice?
«Parle enfin!»
Alors, ma foi, j'ai dit: «Peut-être qu'à la fin
«Tu n'avais pas, ce soir...» Mais un regard sévère
Interrompit ma phrase et, soudain, suffocant,
Tu m'as dit: «Fous le camp!
«Oh! Petit malheureux qui critiques ton père!»

Ce sont là de belles descriptions qui pourraient s'accoler à des noms plus contemporains... Malgré les années, les textes de Guitry demeurent encore d'actualité...

lundi 25 juin 2012

Le concepteur Léonard...


Le schéma ci-dessus (reconstitué par infographie) a été dessiné par Léonard de Vinci (dans le folio 812r du Codex Atlanticus) et a, pendant longtemps, été considéré comme étant la «première automobile».

Depuis quelques temps, les spécialistes ont (re)découvert la véritable fonction de cette machine... de même que de plusieurs autres de ce créateur universel: créer des effets sur les scènes des théâtres! Ses inventions - du moins, celle-ci - répondait donc à des besoins spécifiques... artistique. Le grand génie est, au fond, un grand concepteur d'espace, d'accessoires!

(Merci à Michel Lemelin de m'avoir donné ce lien.)

dimanche 24 juin 2012

Bonne Fête Nationale!


Pour marquer la Fête Nationale de cette année, je retranscris ici un extrait de Vie et mort du Roi Boiteux, de Jean-Pierre Ronfard... peut-être l'oeuvre théâtrale la plus éblouissante par son ampleur, ses nombreuses ramifications et son esprit. 

Ce texte raconte, en six volets (qui totalisent, quand ils sont montés dans leur totalité, plus de douze heures de représentation!), la saga de Richard Premier, un roi estropié, tordu, issus d'une famille du quartier de l'Arsenal, en rivalité constante avec la famille Roberge, anciennement régnant sur l'Abitibi. Un théâtre revendicateur... d'un pays, d'une culture, du droit à l'existence, de l'ambition... Un texte aux références multiples - de Shakespeare à Racine, de Einstein au western - et à la verve soutenu tout du long... avec grivoiserie, vulgarité, lyrisme. De la pure poésie théâtreale... et avec tout ça, une mine de rires inépuisable!

Donc, l'extrait que voici est tiré de la quatrième scène du deuxième volet consacré à L'enfance du Roi Boiteux et présente la première véritable prise de parole de Richard comme un serment face au destin:

Richard Premier entre, il porte sa chaussure orthopédique. Il est seul, il s'ennuie. Il joue avec la tortue. Il lui fait sortir la tête. Il  la met sur le dos et l'observe longtemps. On entend la musique à bouche. Il donne un coup de pied a la tortue. Il va prendre l'épée enfoncée dans le sable. Il la brandit

Moi, moi Richard Premier, Fils de François mort à la guerre! (Il joue dans le sable, il y trace des lignes assez mystérieuses.) Moi, Richard, fils de François Premier et de Catherine Ragone, la Reine mère, elle-même fille de Filippo Ragone, dit le Débile, l'immortel. (Il joue dans le sable, trace d'autres lignes.) Moi le petit fils de Filippo Ragone et d'Angela Roberge, fille du Roi de l'or, Roberge le vieux père, Seigneur d'Abitibi. (Même jeu.) Moi, Moi, Moi, Richard ici, Richard présent, Richard le seul! Que veulent dire ces lignes dans le sable? Elles mènent à moi. Elles me désignent. Sauf une! Celle-là qui sort du ventre d'Augustine Labelle morte n couches, la première femme de mon père. C'est la ligne inacceptable qui porte un nom au bout comme un poisson de braconnier à la canne à pêche: Alcide Premier.

Il n'est pas juste, puisque mon père est mort, qu'il existe encore deux Premier sur la terre. Je ne supporterai pas d'autre Premier que moi. Le nom d'Alcide me brûle la bouche comme un fruit vert, un citron. Alcide Premier ne peut pas vivre, s'il existe un Richard. Et Richard ne sera jamais le second.

[...] Alcide! qu'a-t-il de plus que moi? Le privilège d'être venu plus tôt au monde? So What! Qu'est-ce que cela signifie? C'est à partir du jour où je suis né que s'élève l'échelle de mon temps. Mon regard et ma main créent le monde où je vis. Rien n'existe avant moi, hors de moi. Seule m'importe ma trace dans le sol. (De sa chaussure orthopédique il brouille le sol.)

[...] Eh bien, moi Richard Premier, moi qui suis né malingre, laid, tordu, disgracié, moi le fils de Catherine Ragone, je saurai, par astuce, reconquérir un trône dont la nature et le hasard des temps semblent m'avoir dépossédé.

Allons, Soleil, ne cesse pas d'éclairer le corps estropié de Richard, car Richard, un jour, égalera ton éclat!

Un texte puissant...

samedi 23 juin 2012

Vicky et ses cochons


Vicky Côté continue sa route et sa récolte de prix et de reconnaissances. Elle a remporté, jeudi dernier, à Montréal, lors du 4ième Gala des Cochons d'Or - organisé par les Cartes Prem1ères et récompensant des productions et des artistes de la relèves théâtrales (ce qu'on appelle le théâtre émergeant) - deux prix (et je prends leur nomenclature sur sa page Facebook):

Le Cochon plastique, pour la meilleure conception décor, que le jury a unanimement tenu à donner aux trois concepteurs scénographie/costumes/accessoires (Vicky Côté, Louise Boudreault et Stéphan Bernier) parce que les conceptions étaient trop cohérentes pour être scindées.

Le non moindre
Néo-Cochon, remis pour avoir démontré le plus d'audace et d'innovation dans la création.
 
Bravo à elle, à son équipe, au Théâtre À Bout Portant!

Le Code du théâtre


Tiens... ce matin, je fais une petite promenade entre les pages de ce Code du théâtre, publié en 1882 par Charles Le Senne, avocat à la cour d'appel et membre de la Société des auteurs compositeurs dramatiques. Dans ce recueil (trouvé sur Google Books) écrit à la manière d'un dictionnaire alphabétique, il y a des dizaines et des dizaines de points d'informations sur (et le sous-titre l'indique!) le théâtre, ses lois, ses règlements, sa jurisprudence, ses usages... Le feuilleter permet de découvrir parfois de drôles de consignes...





Bien que je ne sois rendu qu'à la lettre G, je me demande à quoi ressemblerait notre propre code... et quelle(s) pratique(s), pour nous très normale(s), paraîtrai(en)t grotesque(s) pour un lecteur du futur?


jeudi 21 juin 2012

Suivi du second «Forum sur le théâtre au SLSJ»


Nous étions une trentaine de participants, réunis tout l'après-midi, pour discuter de la saison théâtrale régionale («régionale» à défaut d'un terme plus consensuel...), de voir les outils et les moyens que nous pouvions mettre en place pour son articulation, sa promotion.

Après une brève entrée en matière de ma part pour resituer cet exercice du Forum dans sa continuité , resituer les enjeux dégagés l'an dernier, le comité organisateur de cette année (Lyne L'Italien, Réjean Gauthier, Véronique Villeneuve, Marilyne Renaud et moi-même) a laissé une place aux divers comités mis en place depuis la première édition pour un bref suivi: le comité «carte privilège», le comité «cachets de publicité», le comité «cartes blanches», le comité «organisme de services» et le comité «plan d'action». 

Puis il y a eu une première étape à la discussion: la présentation (et bonification) du calendrier de la saison prochaine (2012-2013). Ce portrait global (projeté en direct sur grand écran) permet de voir la diversité de productions à venir et les plages achalandées du calendrier. Cet outil - qui pourrait être en ligne tel que proposé - pourrait permettre, d'une part, sur consultation, aux compagnies de programmer leurs activités en toute connaissance de cause... D'autres part, si il est parfois impossible d'éviter la surcharge de l'offre, le calendrier peut d'ores et déjà cibler avec qui les compagnies doivent se tourner pour établir des partenariats en vue, par exemple, d'une promotion conjointe...

Cette discussion, fort utile, a débordé, inévitablement, sur les problèmes de locaux et de disponibilités des lieux de diffusion. Problème récurrent. Diverses pistes émergent... comme un lieu de création à l'image des ateliers Touttout... un projet de longue haleine, il va sans dire...

Comment chacun peut-il y trouver son compte? Difficile à dire. Chose certaine, la concertation ne nuit pas.

Un outil pour les créateurs, donc, mais qu'est-ce qu'on en fait par la suite? Peut-on définir une saison théâtrale? Ce fut là le sujet de la seconde partie de l'après-midi. Quel(s) moyen(s) prendre pour faire connaître et reconnaître le théâtre d'ici? 

Un premier questionnement: s'il y a promotion, il y a promotion de quoi? De chacune des compagnies? De l'ensemble? En ce cas, quelle image donner à celui-ci? Il a été suggéré de prendre le temps de faire une campagne publicitaire (après consultation d'experts en marketing)... une campagne ciblée. Parce qui cherche-t-on à atteindre? Le milieu culturel déjà sensibilisé? Le grand public?

Après plusieurs minutes d'échanges (je prends là un raccourci!), l'idée retenue est de concevoir un dépliant où chque compagnies et regroupements (selon une grille tarifaire à venir) pourrait inscrire sa programmation (et son créneau). Un objet promotionnel pour tous... imprimé à 10 000 exemplaires. Je m'occuperai de la collection des informations pour le Saguenay et Réjean Gauthier de celle du Lac. Ce premier essai (qui sera réalisé par Christian Roberge) devra être lancé à la mi-septembre.

Il s'agit là d'un premier pas vers une campagne de plus grande envergure. À quoi ressemblera-t-elle? L'avenir le dira.

Il a été convenu, enfin, qu'un troisième (et d'autres!) Forum viendra... à chaque troisième vendredi du mois de juin. Avec un autre sujet. Les agendas peuvent donc être déjà bloqués!

(En attendant, si un participant qui lit à quelque chose à ajouter ou une précision à apporter, il peut le faire via les commentaires!)

Vers le second «Forum sur le théâtre au SLSJ»






Le second Forum sur le théâtre au Saguenay-Lac-Saint-Jean débutera dans quelques heures (de 13h à 17h) à la Salle Pierrette-Gaudreault (Jonquière). Combien serons-nous? Dix? Vingt? Trente? Plus encore? 

Que proposons-nous au cours de cette séance de travail? Une quête pour des outils, des moyens, du concret! Tout pour faire connaître et reconnaître le théâtre d'ici.

mardi 19 juin 2012

De la confiance du metteur en scène...

 
Le metteur en scène doit toujours être sûr de lui en répétition. Mieux vaut faire des fautes, en se trompant audacieusement, que ramper de manière mal assurée vers la vérité. On peut toujours, le lendemain matin, renoncer à une erreur, mais on ne peut jamais retremper la confiance que l'acteur aurait perdue en face d'un metteur en scène qui hésite et qui doute.

Ce credo - de Meyerhold (plus précisément tiré de la page 324 du tome IV de ses Écrits sur le théâtre) - me plaît particulièrement... et ça m'étonne de ne pas en avoir déjà fait un billet! Du moins, je n'en retrouve pas... Mais peu importe. Je crois profondément en ce principe et le relire (ou le réécrire...) me le rappelle avec force.

Une nuance est importante à faire, je crois. Il ne s'agit pas de faire se faire une carapace ou une façade si fausse qu'elle ne donne rien. Il faut juste rester sûr de soi dans les propositions qu'on fait... en étant bien confiant (et conscient!) que la modification est possible et qu'on peut se le permettre.


lundi 18 juin 2012

De la voix de l'auteur... et de son peu d'importance selon Schechner


 Décidément, mon week-end fut schechnérien... et j'y retrouve, finalement - moi qui n'a jamais accroché au théâtre américain - des points de vue que je partage somme toute assez facilement. Comme celui-ci, expliquant (toujours dans Performances - Expérimentation et théorie du théâtre aux USA, page 39), en quelques termes simples, que la fonction de la mise en scène n'est pas de correspondre à la vision, la voix de l'auteur:

Le travail de mise en scène consiste à redonner une vision scénique à la pièce, non pas en essayant de retrouver celle de l'auteur, mais en cherchant en quoi les circonstances immédiates révèlent le texte. Il est de toute façon généralement impossible de retrouver la vision de l'auteur de la pièce. Cette vision peut être inconnue, comme c'est le cas de la plupart des écrivains prémodernes; ou alors la pièce est montée dans un contexte culturel différent de celui d'origine, ou encore les conventions et l'architecture du théâtre rendent cet objectif impossible. Redonner une vision scénique à la pièce est un processus incontournable, car la matrice socio-culturelle de la vision originelle change rapidement. La vision originelle est liée a la matrice originelle et se perd en même temps qu'elle. À mon avis, même la première mise en scène d'un drame n'a pas une position privilégiée à ce égard, à moins que l'auteur lui-même soit aussi le metteur en scène, et ce privilège disparaît avec l'auteur.


dimanche 17 juin 2012

«Orphée aux enfers» [Carnet de mise en scène]

Affiche de la seconde version de l'oeuvre produite en 1874
 
Nouvelle catégorie de billets; nouveau carnet de mise en scène... 

L'annonce a été faite il y a quelques jours (voir ici) par Martin Boucher, directeur artistique de la Société d'Arts Lyriques du Royaume: je serai le metteur en scène de la prochaine opérette présentée cet hiver, dans un Auditorium-Dufour rénové...

L’œuvre choisie est Orphée aux enfers d'Offenbach... la version courte de 1858. Ce sera la troisième fois que l'organisme la produit. Mais comme je ne l'ai pas vue, je n'ai aucune préconception de laquelle je dois me départir... Mais beaucoup, beaucoup d'airs connus et une histoire, parodie de la mythologie grecque, qui ne m'est pas étrangère...

Je dois donc, dans les mois à venir, me plonger dans le coffret que je me suis procuré pour écouter et assimiler et l'intégral musical et le livret tout en peaufinant une ébauche de conception esthétique que je soumettrai à l'équipe à la toute fin de l'été (une première proposition très préliminaire ayant été déposée il y a quelques temps)... Mettre les chanteurs et la musique en valeur dans un cadre théâtralisé... Des idées, j'en ai. J'y reviendrai dans un billet subséquent...

Un gros projet en perspective... avec un orchestre, un choeur et des chanteurs professionnels... à la suite de tout le travail fait par Éric Chalifour au cours des dernières années... Un défi stimulant.

L'Ordre du Bleuet


Hier soir avait lieu le Gala de l'Ordre du Bleuet où de nouveaux membres ont été intronisés... Chaque année, ils sont près (parfois un peu plus) d'une dizaine, issus du milieu culturel, à faire leur entrée au sein de cette confrérie qui se donne pour mission de reconnaître ces gens qui ont contribué à l’essor de la vie culturelle du Saguenay–Lac-Saint-Jean, soit par leurs actions démontrant un engagement exceptionnel, soit par la grande qualité de leurs œuvres et de la pratique de leur art ou encore par leur rayonnement (voir le site de l'Ordre).

Par les années passées, plusieurs sont venus du milieu des arts de la scène (de la danse, de la musique ou du chant lyrique)... mais seuls Ghislain Bouchard et son épouse ont été nommés pour le théâtre... du moins jusqu'à hier où deux nouvelles personnalités ont obtenu cette reconnaissance.

Le premier (selon l'ordre alphabétique) est de Roberval. Il s'agit de Réjean Gauthier, du Théâtre Mic Mac.  Depuis plusieurs années, il y a officié à titre de comédien, de metteur en scène (dont leur dernière production, en avril dernier, d'Albertine en cinq temps), de concepteur (notamment pour les costumes, les coiffures et les maquillages). Un collaborateur méticuleux, enthousiaste et dynamique quand il fait partie d'une équipe de création! Il faut aussi mentionner que son implication dépasse le seul cénacle du Mic Mac alors qu'il siège à la table de la culture de Roberval (bon, le nom n'est pas précis) en plus d'animer sa propre compagnie de formation et de création, La Valise Animée

Le second est Rodrigue Villeneuve, de Chicoutimi... dont le principal fait d'arme est peut-être d'avoir été à la source, comme professeur en théâtre à l'UQAC, l'initiateur d'un véritable milieu régional (alors qu'il a formé la majorité des praticiens actuels). En parallèle, toute son action artistique avec les Têtes Heureuses (qu'il a cofondé avec Hélène Bergeron et Marielle Brown) est à souligné tant par sa cohérence que sa rigueur scénique. Une culture imposante. Une mine de savoir.

Bravo à eux deux.




samedi 16 juin 2012

Une histoire étymologique du théâtre


 Bien que je ne sois pas un grand fan (du moins, un grand connaisseur) de l'école de pensée théâtrale américaine, je dois reconnaître que la lecture de l'un de ses éminents avant-gardistes, Richard Schechner (et son ouvrage Performance - Expérimentation et théorie du théâtre aux USA, réussit à m'intéresser à chaque fois. (D'ailleurs, lors de l'atelier sur la recherche-création en milieu universitaire qui s'est tenu au début du mois de juin, on m'a chaudement recommandé d'approfondir cette voie américaine dans la redéfinition de la théâtralité/performativité...)

Feuilletant donc ce bouquin à la recherche d'un passage que j'avais noté dans mon carnet, je tombe sur celui-ci  en page 468 qui, en quelques lignes, donne la mission fondamentale du théâtre en passant par l'étymologie (qui aurait pu être écrit par le professeur de La leçon de Ionesco!):

Avant d'aller plus loin, revenons sur la notion occidentale de théâtre. Le terme «théâtre» s'apparente à théorème, théorie, théoricien et autres termes du genre, issus du grec theatron, de thea (une «vue») et de theastai («voir»), aussi apparenté à thauma («quelque chose qui attire le regard, une merveille») et theorein («regarder»). Theorein  est apparenté à theorema, «spectacle» et/ou «spéculation». Ces termes auraient pour racine l'indo-européen dheu ou dhau («regarder»). La racine indo-européenne de Thespis, nom du légendaire initiateur du théâtre grec, est seku, qui signifie «remarque» ou «adage», et sous-entend une vision divine. De seku viendraient les termes anglais see («voir»), sight («vue») et say («dire»). Ainsi, le théâtre grec, et tous les théâtres de type européen qui en dérivent, sont des lieux où l'on va pour voir et dire, et d'où l'on voit et dit. Ce type de théâtre, tout comme le cinéma et la télévision qui en sont des dérivés, est caractérisé par sa spécularité, ses stratégies du regard.

C'est là l'un des paradigmes essentiel du théâtre... mais, comme je l'ai déjà écrit quelque part (pour être plus précis), certains - comme Castelluci - le surpasse pour faire du théâtre contemporain non plus un lieu où l'on voit mais plutôt le lieu où l'on montre...

vendredi 15 juin 2012

Le théâtre, art du faux?

 
Les planches?... je ne connais pas les planches. 
Je connais le gazon que foulent Roméo et Juliette; 
je connais le sable qui crie sous le pas furtif de Don Juan; 
je connais les piquants d'éteule sur lesquelles trotte le barbet de Faust; 
je connais le marbre où se traînent les sandales d'Oedipe; 
je ne connais pas les planches!

Ces mots sont tirés du discours d'Edmond Rostand - l'auteur de Cyrano de Bergerac - lors de son entrée à l'Académie française au début du XXième siècle. Ils soulignent bien tout le paradoxe théâtral: faire vrai avec du faux.

jeudi 14 juin 2012

Le mystère du rythme scénique...


Comment un comédien, en jeu, peut-il avoir connaissance du rythme? Comment sait-il que le temps laissé entre deux répliques n'est ni trop long, ni trop court? Comment sait-il que le temps qu'il met à faire une action ou un déplacement ne ralentit pas l'ensemble scénique? Comment sait-il jouer avec le temps (je devrais plutôt dire les temps: le temps réel de l'acteur sur les planches, le temps réel du dialogue avec la salle, le temps fictif de l'intrigue... comme définit dans ce billet) de façon efficace?

Ces questions (que je me suis posées alors que j'assistais, comme spectateur, à une répétition de La Marmite hier matin), je les trouve fascinantes... et aussi terriblement embêtante quand vient le temps de les aborder avec des interprètes en tant que metteur en scène. Il s'agit là d'un sujet sans consistance... Pour moi, cette notion, le rythme, est aussi insaisissable que celle de la présence. Cet autre élément ésotérico-théâtral. Impossible à décrire parfaitement mais si facile à ressentir de la salle... Conceptuel, abstrait... mais pourtant terriblement concret et physique!

Peut-être le comédien l'a ou ne l'a pas... C'est, en d'autres termes, le fameux sens du timing... Bien sûr, il peut compter mentalement, oui, pour arriver à un résultat potable... mais ça restera toujours une béquille un peu figé dans un carcan temporel... 

Le véritable sens du rythme est improvisé.

Une seconde de trop ou une en moins, et l'effet s'effondre... même s'il est toujours là. Plusieurs en trop, plusieurs en moins et il disparaît complètement. Le contrôle de la durée (que je qualifierais de scénique) est essentielle (tout comme le sont le contrôle de la voix, du corps, de l'espace)... particulièrement le cadre d'une comédie où le rythme est souvent à la base de tout.

Un cours de théâtre

Légèreté du jeudi matin...

mercredi 13 juin 2012

Vers le second «Forum sur le théâtre au Saguenay-Lac-Saint-Jean»


C'est dans quelques jours que se tiendra, grâce au soutien de Ville Saguenay, du MCCCF et du Conseil Régional de la Culture, la seconde édition du Forum sur le théâtre au Saguenay-Lac-Saint-Jean qui prendra, cette année, la forme d'une séance de travail intensive pour établir, éventuellement, une véritable saison de théâtre concertée. Tout ceci se passera le jeudi, 21 juin 2012 en après-midi, à la Salle Pierrette-Gaudreault (Jonquière). Voici l'ordre du jour préparé:
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12h30
Arrivée des participants et inscriptions 

13h00
Mot de bienvenue prononcé par Dario Larouche
            Bilan de l’année 2011-2012
            Objectif(s) de la journée 

13h05
Suivis des différents comités mis en place en 2011-2012
           Comité « Carte privilège »
           Comité « Cachets pour pub»
           Comité «Plan d’action»
           Comité « Cartes blanches»
           Comité « Organismes de services»

13h25
Présentation de l’animatrice et ouverture du 2ième Forum sur le théâtre au SLSJ

PREMIER AXE – LE CALENDRIER DES PRODUCTIONS RÉGIONALES

13h30 à 14h45
La réflexion
        Quelles productions ponctueront la prochaine saison ?
        À quoi ressemble le calendrier de ce qui s’en vient ?
        Quelles sont les espace-temps libres ?

Pause de 15 minutes (14 h 45 – 15 h)

DEUXIÈME AXE – UNE SAISON THÉÂTRALE RÉGIONALE

15h à 16h30
La réflexion
        Quelle forme, quelle couleur peut-on donner à cette saison?
        Quels moyens prend-t-on pour la mettre en forme?
        Quels moyens prend-t-on pour la faire connaître?
        Comment en tirer profit? Tant le milieu que les spectateurs?
        Est-il possible de faire circuler le théâtre qui se fait ici, dans la région? 

Projet d’auditions publiques pour le 3ième Forum

16h30
Conclusion(s)
       Synthèse des discussions de l’après-midi par Isabel Brochu.
       Et maintenant ? Quelles sont les étapes et/ou les actions à entreprendre qui se dégagent à la suite de  cette journée de réflexion ?
        Remerciements d’usage et Invitation au 5 à 7.
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L'importance de cet événement, des actions qui suivront (car il y en a... un suivi sera donnée lors de l'activité), dépend proportionnellement du nombre de participants. Auteurs, metteurs en scène, concepteurs, acteurs, directeurs, étudiants, professeurs, amateurs, professionnels... tous sommes concernés dans l'évolution de notre milieu. Les inscriptions sont souhaitées...

mardi 12 juin 2012

Autocitation

Dans un article écrit l'an dernier (pour le second numéro de la revue Zone Occupée), Le théâtre professionnel au Saguenay, un état des lieux, j'ai dressé le portrait théâtral des dix dernières années... posant, au passage, un constat qui fait échos à bien des billets écrits sur ce blogue:

Par ailleurs, devant cette prolifération de propositions (en parlant des compagnies et collectifs), il est facile de constater que les espaces critiques sont inversement proportionnels à celles-ci et que ceux qui restent flirtent dangereusement avec un populisme de bas niveau d’où sont exclues l’observation objective et la réflexion. Comment alors les praticiens peuvent-ils se prévaloir de ce miroir, de cet interlocuteur privilégié qu’est le critique qui le force à se commettre, à argumenter, à se dépasser ? Si les médias traditionnels se déchargent de ce rôle, n’est-ce pas au milieu lui-même de reprendre le contrôle de son analyse ? Et ce, de façon franche et honnête, rigoureuse et sans complaisance ? 

Je le pense encore.

lundi 11 juin 2012

Vide.


 
Pour faire face à de nouveaux publics,
nous devons tout d'abord
être en mesure de faire face
à des sièges vides.

Cette phrase de Peter Brook (un extrait de Salem - le nouveau théâtre en Angleterre trouvé sur un site de citations) permet, en quelque sorte, l'erreur, l'essai. Une phrase bien optimiste, bien réelle... mais qui n'enlève pas, lorsque ça arrive, la déception et l'amertume.

samedi 9 juin 2012

Les prérequis du comédien...


L'homme qui se destine au Théâtre ne doit avoir aucun reproche essentiel à faire à la Nature: un défaut de conformation est une tache au talent; le Comédien, fait pour occuper l'attention, attacher les yeux, intéresser et étonner toujours, ne doit rien laisser à désirer: il faut que son physique flatte, que ses grâces soient naturelles , qu'il ait du maintien, une démarche facile, convenable aux rôles: que sa physionomie soit mobile et annonce de l'esprit: que sa taille représente, et que sa voix flexible, onctueuse, nette, puisse s'étendre et se promener facilement dans tous les tons. Il lui faut partout le physique comme les manières et le costume du personnage qu'il représente; et comme toujours chaque personnage doit être présenté par le côté qui lui est plus favorable, que la Nature au théâtre ne se montre qu'en beau, le Comédien doit, pour la rendre telle, avoir à sa disposition une collection de pinceaux.

Tels sont les mots employés dans Les éléments de l'art du comédien, paru au tout début du XIXième siècle, pour définir les prérequis du comédien de la grande époque théâtrale noire, rouge et or. L'auteur, un certain Dorfeuille (vive les découvertes de Google Book!), en dresse là un portrait qui peut, aujourd'hui, paraître un peu suranné, pompeux (et redondant!), mais qui, dans l'ensemble, peut tenir encore la route: 




Bon. L'insistance sur le Beau et l'esthétique pèse un peu et verse un tantinet dans la ségrégation (ou l'exclusion). Ça sonne un peu folklorique... mais peut-être les choses n'ont-elles pas tant changé...

vendredi 8 juin 2012

De l'épuisement de courir après l'argent...


Par ce billet, je donne suite à celui écrit par le collègue Stéphane Boivin sur le blogue de La Rubrique (ici) de même qu'à la déception de Vicky Côté manifestée sur Facebook au lendemain de sa soirée bénéfice tenue il y a quelques temps devant une assistance où peu de gens du milieu se trouvait...

Courir après l'argent est peut-être l'une des principale tâche (ou l'enfer... c'est selon) de tout organisme culturel... au détriment, bien souvent, de la création. C'est là un paradoxe exténuant: que du temps perdu (devant un clavier pour remplir des formulaires et monter des dossiers, en rencontres ou au téléphone!) qui demande énergie débordante et persévérance à toute épreuve!

Cette course - à obstacles, devrais-je rajouter! - mène parfois vers des résultats qui donnent des sueurs froides: coupures, compromis, reports... L'artiste au crochet de l'état, l'artiste qui quête, est un préjugé tenace... relent d'une petite droite démagogique qui s'étend de plus en plus. Et même si les montants ne sont souvent pas si exorbitants, leur caractère artistique fait souvent bien piètre figure aux côtés des causes humanitaires et celles axées sur la santé. Et une petite organisation peine à s'imposer face à une plus grande ou aux événements majeurs...

Par ailleurs, devant la multiplication des organismes culturels et des productions indépendantes, il y a une forte augmentation des activités de financement. Comme on se partage un bassin réduit de population, on se partage également un bassin réduit de partenaires...
 
Trouver de nouvelles formules pour attirer les donateurs, trouver de nouvelles approches, de nouveaux «produits» rentables devient un casse-tête sans fin. Être original pour attirer l'attention. Les mécènes ne courent pas les rues... et il faut parfois s'échiner à valoriser nos actions. Cette recherche de soutien est essentielle et permet de combler des subventions trop maigres (ou parfois inexistantes). Mais comment se vendre?

S'il y a un grisant enthousiasme lorsque nous trouvons un nouveau commanditaire, il y aussi - et en plus grande quantité! - bon nombre de refus... parfois directs et agressifs. 

Alors, vers qui se tourner? Vers nos spectateurs habituels, vers les gens du milieu même? Oui... peut-être. Bien qu'ils soient hyper sollicités (en plus de donner de leur temps), ils seront probablement au rendez-vous... Mais porter la santé financière de la culture sur leurs épaules m'apparaît être un bien lourd fardeau. Et cette obligation morale qui provoque le remords... Il faudrait parfois faire une campagne de financement pour pouvoir assister aux diverses soirées bénéfice! L'épuisement (tant financier, physique que moral) pointera un jour ou l'autre et personne ne sera plus avancé.

Et si la solution était ailleurs? Elle doit nécessairement être ailleurs, en fait... On ne peut définitivement pas continuer comme ça. Peut-être faudrait-il se constituer en regroupement et que c'est celui-ci, au nom de 3, 4 ou 5 compagnies théâtrales, qui s'impliquerait pour offrir une plus grande visibilité aux entreprises donatrices et aller chercher des montants plus substantiels (qui, au final, après le partage, serait avantageux)?  Faudrait voir...


«La Marmite» [Carnet de production]

Voici, en primeur, l'affiche de la prochaine production estivale du Théâtre 100 Masques qui débutera dans quelques semaines. C'est une conception collective réalisée par Julie Bernier qui devrait partir à l'impression dans quelques minutes.


Dans un tout autre ordre d'idées, nous avons fait hier notre entrée en salle - soit la Salle Murdock. Déjà nous avons installé la scène dans un rapport frontal sur toute la largeur, de la coulisse à la régie englobée dans l'aire de jeu... à l'instar du schéma ci-dessous (qui n'est absolument pas à l'échelle!):

Aujourd'hui, nous devons construire toutes les structures qui nous permettront de l'habiller selon l'esthétique choisie. Une scénographie qui sera somme toute assez simple... malgré son apparence chargée (enfin, si nous arrivons à réaliser nos ambitions!).

jeudi 7 juin 2012

Festivité de plus en plus difficile à prévoir



Comme plusieurs organismes, le Théâtre 100 Masques a déposé, dans les dates, un projet en vue de ces festivités... projet qui - s'il est retenu - pourrait se voir financer...

Le hic, c'est que le dépôt devait se faire avant le 13 janvier 2012... et que la réponse, prévue originalement en avril,  tarde toujours à nous parvenir. La raison? Le comité lui-même est en attente de diverses réponses des différents paliers de gouvernement... On peut écouter ici l'entrevue de la directrice, Line Gagnon, présentée hier sur la première chaîne de Radio-Canada, qui affirme que les organismes recevront une réponses d'ici la mi-juillet... peut-être aussi le début du mois d'août. Que rien n'est problématique... que tout est normal... enfin, presque.

Et pourtant...

Depuis avril, donc, la suite des activités du Théâtre 100 Masques (et les miennes, par conséquent) se fait avec une tentative de laisser de l'espace pour le projet en question - par ailleurs fort stimulant - qui demande une grande préparation (recherche, écriture, conception, mise en scène) et du temps. Mais l'échéancier prévu (théoriquement, je devrais être sérieusement en écriture) se réduit terriblement... et, parallèlement à ce problème, mon agenda personnel se rempli de gros projets pour les mois à venir. La marge de manœuvre pour cette création existe toujours mais elle rétrécit.

Du même coup, rien n'indique que notre projet est éventuellement sélectionné et toutes les contorsions d'horaires se font peut-être en vain.

Si la réponse se fait encore au-delà de juillet, nous serons dans l'obligation (avec beaucoup de déception) de retirer notre dossier... ou d'en modifier le calendrier.

 Dans ce milieu, l'attente est la pire des choses.

mercredi 6 juin 2012

Déculotter la vieille

La première vieille (Mélanie Potvin) de l'Assemblée des Femmes, Théâtre 100 Masques 2010

Quand un spectateur, dans la salle de théâtre, voit des trucs qu'il ne devrait pas voir - comme des erreurs de mises en scène, d'entrées, d'éclairages, de costumes qui tombent (comme le personnage de la photo ci-haut qui perdit sa couche en pleine représentation...), etc - on dit qu'il déculotte la vieille. L'image est saisissante... Brrr...

Selon le Dictionnaire de la langue du Théâtre, l'origine de l'expression [est] à chercher du côté des vaudevilles et de l'époque des couchonneries (j'ai déjà écrit un billet, , sur ce type de théâtre) où un rapide changement de décor aurait amené le spectateur à voir des choses qui ne lui sont pas destiné!

mardi 5 juin 2012

«La Marmite» [Carnet de production]


 C'est cette semaine que la production La Marmite doit prendre ses quartiers dans la Salle Murdock du Centre des Arts et de la Culture de Chicoutimi.

Après une petite pause de quelques jours, suite au premier enchaînement du 28 mai dernier - qui a su démontrer la mise en scène, les personnages, les enjeux -, les comédiennes ont repris, hier, les répétitions pour un dernier droit puisque nous voici à un mois, jour pour jour, de la grande première. Ce sera là une production très drôle dont les liens avec notre contemporanéité, quelques deux mille quatre cent ans plus tard, sont frappants.

Pendant ce temps, il y a tout un autre travail en cours: les costumes. Peu à peu se définit le principe directeur et l'ensemble esthétique. Par tâtonnement. Par propositions. Par essais. Les personnages - il y en a dix, si je me souviens bien - sont divisés en trois familles: le clan d'Euclion (le riche qui veut avoir l'air pauvre et son esclave), le clan de Mégadore (le riche qui porte les marques de sa fortune, sa soeur, son neveu et son esclave) puis les personnages accessoires (le dieu Lare, les cuisiniers, la joueuse de flûte). Les deux premiers regroupements sont relativement sur la bonne voie. Les autres demandent encore de la réflexion... même si de nouvelles propositions seront fixées aujourd'hui.

Le chantier scénographie sera mis en branle à compte de jeudi après-midi, selon toute vraisemblance.

Reste maintenant le matériel promotionnel (affiches et feuillets) à produire. Enfin... il est en cours de création et devrait théoriquement être en impression d'ici demain ou jeudi.

Le sprint commence.

lundi 4 juin 2012

Ces spectateurs sur le théâtre...


Pendant longtemps, en France (et en Europe), principalement pendant les XVIIième et XVIIIième siècle, eut cours une bien étrange coutume théâtrale: les gens du bel air prenait place sur scène, avec les acteurs, pour se faire voir plus que pour ne voir la pièce... De bien encombrants accessoires!

Vraiment, une coutume qui me fascine (et qui a déjà fait l'objet d'un billet paru le 27 août 2011).

Voici comment Dorat, éminent poète et dramaturge français, célébra la fin de cette coutume en quelques vers bien sentis...


De nos jours, ils ne sont peut-être plus sur les planches, ces spectateurs... mais parfois, ils demeurent aussi bruyants et font autant de tapage et de commentaires que ces beaux marquis... Comme quoi tout ne change pas si vite...

dimanche 3 juin 2012

Bravo!




Les applaudissements, lors d'une représentation théâtrale, peuvent aussi servir de matière à réflexion! Comme en fait foi cette petite description - tirée du Dictionnaire de l'art dramatique à l'usage des artistes et des gens du monde par Charles Marchal - qui nous apprends les mécanismes de ceux-ci dans l'Antiquité romaine...

Les Romains portaient très loin l'industrie des applaudissements, ils les divisaient en trois classes, selon Suétone : 1° les bombi, dont le bruit imitait le bourdonnement des abeilles ; 2° les imbrices qui retentissaient comme le pluie tombant sur les tuiles; 3° les testœ, dont le son éclatait comme celui d'une cruche qui se casse. Sénèque nous apprend qu'on applaudissait aussi en faisant voltiger le pan de la robe, ou avec les doigts, qu'on faisait claquer, ou enfin de la même manière que nos applaudissements. Selon Properce, on se levait pour applaudir. Tacite, qui se préoccupe plus de la qualité que de la quantité, se plaint des applaudissements maladroits des gens de la campagne, qui troublent l'harmonie générale des applaudissements modulés. Les comiques romains ne se faisaient pas scrupule de solliciter des applaudissements du public : coutume observée rigoureusement par Plaute et Térence à la tin de leurs pièces, et que nos vaudevillistes ont conservée.

Comme dirait l'autre: «Ils sont fous, ces Romains!»

Atelier sur la recherche-création

 
J'ai participé, au cours des derniers jours (vendredi et samedi) à cet Atelier scientifique sur la recherche-création en théâtre dans le milieu universitaire qui s'est tenu à Québec (et dont tous les partenaires sont soulignés dans le haut de l'image).

Cette activité - qui réunissait de nombreux étudiants, doctorants, professionnels et professeurs - permet d'échanger sur des pratiques, des méthodologies de travail; de passer, d'une certaine façon, le test de la «validation» par les pairs; d'établir un nouveau réseau de contacts de haut niveau; d'entrer dans un circuit de pensée.

Pour ma part, j'ai fait une communication sur l'état de ma recherche. La voici, en partie... la partie qui explique le projet.

Depuis septembre 2009, je poursuis des études doctorales à l’Université Laval, en Littérature et art de la scène et de l’écran. Mon sujet est la redéfinition des deux grands pôles théâtraux que sont la THÉÂTRALITÉ et la PERFORMATIVITÉ dans une approche néo-meyerholdienne… auxquels j’ai ajouté – il en sera question plus loin – la LITTÉRARITÉ («littérarité» que j’utilise à défaut d’avoir un terme plus approprié pour le moment).

Une recherche qui me semble importante, particulièrement à notre époque, alors que le théâtre contemporain, éclaté tant dans le texte que dans la forme, pétri d’une vision téléologique performative, interdisciplinaire, postmoderne ou postdramatique - c’est selon la formule qui plaît le plus à chacun - met à mal, plus souvent qu’autrement, l’une ou l’autre, l’une et l’autre, l’une contre l’autre, l’une pour l’autre ces notions qui paraissent fuyantes, aux contours floues, à la mise en pratique arbitraire selon les différents praticiens-théoriciens-sémiologues… De Roland Barthes à Josette Féral en passant par Ubersfled, Bernard Dort, Michel Corvin, Jean-Pierre Sarrazac , Richard Schechner et Patrice Pavis (de qui je me réclame le plus), sur tous ces sujets, les phrases s’accumulent, se complètent, se contredisent… au même rythme que le théâtre se fragmente, se déconstruit, se reconstruit.

Devant ces innombrables imbroglios lexicaux qui ne manquent pas de donner le vertige à tout chercheur, il me semble utile de revenir (au risque de me faire taxer de radical) au fondements même du théâtre – soit un texte, un comédien, un espace -, pour redéfinir efficacement ces trois grands principes, délimiter leurs champs d’actions et leurs articulations mutuelles.

C’est donc dans cette perspective - soutenir le passage du texte à sa mise en scène par le médium du corps - que cette présente recherche s’échafaude, prenant principalement appui sur les écrits et les conceptions artistiques de l’un des premiers grands metteurs en scène de l’histoire du théâtre, Vsevolod Emilievitch Meyerhold.

Pourquoi lui? Parce que s’insurgeant contre ce qu’il considérait, à l’époque, comme un cul-de-sac artistique, soit le naturalisme, il s’est attaché, à partir de la matérialité du texte, à rehausser, d’une certaine façon, la performativité de l’acteur, à jeter les bases d’un théâtre de la convention consciente pour redonner à la scène ce qu’elle avait délibérément mis de côté : sa théâtralité.

Et si cette source du passé s’avérait, après approfondissement, être d’une étonnante actualité pour tenter de définir ces trois pôles dont il est question? Et si les explorations et les expérimentations de ce praticien, valables dans les années du symbolisme et de ses suites, pouvaient se poser comme réponse solide face à cette dispersion théorico-sémiologique? Et s’il s’agissait, finalement, d’établir une approche néo-meyerholdienne pour aborder le théâtre contemporain sur de nouveaux paradigmes?

En quelques mots, cette approche néo-meyerholdienne devrait être, selon toute vraisemblance, un renouvellement et/ou un dépassement des théories d’avant-garde du metteur en scène russe. En les synthétisant rigoureusement, elle pourrait probablement se profiler comme étant une approche formelle et concrète de ce triumvirat théâtral - que sont la LITTÉRARITÉ, la THÉÂTRALITÉ et la PERFORMATIVITÉ - par le biais de l’interprète qui reste, avec son metteur en scène, au centre de la création. Elle viserait essentiellement une matérialisation du texte (comme moteur dramatique générateur de tensions, de décalages, de rythme), de la scène (comme esthétique motrice et dynamique), du corps (comme paramètres de jeu, de potentiel événementiel, de liberté) pour la construction, dans leurs continuelles interactions, d’effets simples mais efficaces.

Mais soyons plus précis. (À noter que ce qui suit n’est pas exhaustif et subit un peu les contrecoups de la limitation de temps.)
 
 
Posons donc, tout d’abord, dans une optique dramatique, la LITTÉRARITÉ (qui, je le rappelle, est un «mot de travail»), c’est-à-dire l’écriture comme tel, dans sa plus simple expression (les mots, la syntaxe, la ponctuation, le style). Sa spécificité est d’être, par essence ou par choix, destinée à la scène, la mise en voix, la mise en rythme. Passer de l’écrit à la dimension esthético-performative. Ce concept recouvre tout le champ textuel, du texte dramatique à tout autre texte, en passant par toutes les formes de l’écriture actuelle, parce que oui, selon l’approche néo-meyerholdienne, le texte demeure un ancrage essentiel à la production. Ce champ textuel est pris dans sa matérialité (sans pour autant exclure la fable et/ou l’intrigue puisque selon Meyerhold, «la forme et le fond constituent un tout»), devient une véritable matière, une partition physique, un tissus sonore et rythmique qui trouvera son aboutissement dans sa mise en scène. Cet espace de l’auteur deviendra le générateur. Le corps-émetteur.

Il y a ensuite la THÉÂTRALITÉ. Si, de cette notion on retire les éléments propres au champ textuel (dans la formule de Roland Barthes : «Le théâtre moins le texte») et qu’on lui soustrait également les caractères du vivant, de l’éphémère et du sensoriel pour les attribuer à la prochaine notion, cette THÉÂTRALITÉ reste avec ce qu’on pourrait définir comme le champ relatif à la scène, aux codes théâtraux, de la disposition architecturale aux questions de conception de lumières, de scénographies, de costumes. Il s’agit là, pour résumer un peu rapidement, de ce qu’on peut appeler l’écriture scénique dans la lignée même de Patrice Pavis qui y voit une utilisation pragmatique de l’outil scénique, de manière à ce que les composantes de la représentations se mettent réciproquement en valeur. Car oui, cette écriture, cette théâtralité, est au service de l’interprète, elel soutient son jeu comme elle la dynamise. De la définition d’Ubersfeld pour qui la théâtralité est la présence dans la représentation de signes qui disent clairement la présence du théâtre, on se rapproche de ce que Féral mentionne à propos de la théâtralité de Meyerhold, à savoir que cette celle-ci est bel et bien un acte d’ostension porté par l’acteur et qui désigne le théâtre comme tel et non le réel. C’est, en deux mots, le corps esthétique.

À côté des écritures textuelles et scéniques, ne manque plus que l’élément vivant, sensoriel, actif : la PERFORMATIVITÉ. Elle reprend donc, à son compte, le champ sensoriel de la représentation. Elle s’inscrit dans la brèche entre le réel et la fiction. Ses deux caractéristiques principales seraient d’abord son événementialité (et par là, la liberté inhérente à celle-ci, sa faculté d’entrer en contact avec le public) puis une obligation d’engagement de l’acteur (ici pourraient s’inséréer les 4 opérations schechnérienne: être, faire, montrer le faire, expliquer). Alors que la théâtralité crée le code, la performativité crée le(s) sens, ouvre le potentiel d'actions. Personnage ou figure? Peu importe. Ce qui compte, c’est l’action du comédien. C'est ici que réside le côté «unique» de chaque représentation de même que le caractère éphémère du théâtre. C’est, toujours selon l’approche néo-meyerholdienne, l’espace ouvert sur le texte et sur la scène, l’espace nécessaire au comédien pour contrôler son action, agir, rester à l’écoute de ce qui se passe, réagir, sentir le rythme. 
Ce serait donc le fait du corps spatio-temporel (ici et maintenant). Irons-nous jusqu'à définir la performativité d'après cette phrase de Meyerhold: «Chaque acteur, par sa façon de combiner dans son jeu le verbe, le son, le rythme, les objets et les partenaires, est à chaque instant son propre metteur en scène»? Peut-être.

À partir du moment où ces trois grands pôles sont délimités, l’espace de création (le fait du metteur en scène et de l’acteur) a pour but de les conjuguer l’un à l’autre. De les mettre en rapport, en quête de l’équilibre parfait. D’où sa présence centrale, littéraire, théâtrale et performative. Le théâtre se construit sur tout un jeu de poids et de contrepoids, d’actions et de réactions.

Cette mise en scène passe donc principalement en trois différents rapports de matérialité intrinsèques, nécessaires et constants, où chacun de ces pôles trouve son accomplissement dans les deux autres : il y va ainsi de la mise en voix, de la mise en espace, de la mise en corps… Telle sera l’approche néo-meyerholdienne (assez proche, je crois, de sa source originale). Reste à le démontrer.

Mais où se situe alors le glissement, le dépassement, le renouvellement qu’on est en droit d’attendre de celui qui s’inscrit dans un courant vieux de cent ans ? La réponse viendra bientôt, je l’espère…