mardi 17 décembre 2013

Du texte

Parmi les théoriciens qui font partie de ma constellation, il y a Anne Ubersfeld (dont la plaquette Termes clé de l'analyse du théâtre est citée abondamment sur ce blogue). Une sémiologue qui vulgarise bien la pratique théâtrale sans faire de compromis sur la rigueur intellectuelle:

D'où il suit que le sens au théâtre, non seulement ne préexiste pas à la représentation, à ce qui est concrètement dit, montré, mais qu'il ne se fait pas sans le spectateur. De là les insolubles difficultés de toute herméneutique au théâtre: comment décrypter un sens qui n'est pas encore produit? Le texte est de l'ordre de l'indécidable; c'est la pratique qui constitue, construit le sens. Lire le théâtre, c'est préparer simplement les conditions de production de ce sens. C'est la tâche du «dramaturge», du sémiologue, du metteur en scène, du lecteur, la vôtre, la nôtre. 

lundi 16 décembre 2013

«Au champ de Mars»... [Carnet de mise en scène]


La production Au champ de Mars, du Théâtre Mic Mac est maintenant lancée. Après un week-end de répétition, plusieurs scènes sont grossièrement placées, nous donnant, du coup, un aperçu du spectacle à venir.
 
D'abord, il faut dire que l'espace scénique/dramatique n'est composé que d'un long plancher en ardoise (comme la tuile qui illustre ce billet) de 60 pieds de long par 6 pieds de large. Ce corridor étroit séparera l'espace public en deux, pour une bi-frontalité toute aussi riche qu'exigeante. (Par ailleurs tout l'ensemble esthétique sera de cette couleur anthracite...)
 
Donc, nous voici déjà avec un premier squelette qui nous fait réaliser rapidement à quel point chacune des scènes se télescope à la suivante... Ce texte est construit selon un mode cinématographique assumé qui pose de bons défis d'interprétation et de mise en scène.
 
Lors de la prochaine fin de semaine (au début de janvier), je compte bien terminer cette première ébauche pour l'ensemble de la pièce... ébauche qui reposera par la suite 5 semaines avant une reprise intensive du travail de création qui se poursuivra, en février et mars, jusqu'à la première.

vendredi 13 décembre 2013

«Trou Noir»... un premier bilan

Les représentations spéciales de Trou Noir sont maintenant faites. Deux représentations pour ajuster le concept de l'espace (et le rendre autonome en vue de sorties). Voici quelques photographies prises par Alexandre Nadeau:










Pour la prochaine série, il y aura assurément quelques ajustements à apporter.

Notamment, au chapitre des lumières. Dans un souci d'autonomie, il a été convenu, dès le départ, qu'il n'y aurait pas de modifications à l'éclairage pendant la représentation (les cues). Toutefois, après le montage et les différents essais en vue de concevoir l'ambiance, plusieurs possibilités nous sont apparues et nous ont donné l'envie de pousser plus loin cet aspect.

Par ailleurs, ce monologue ayant toujours été répété dans un cadre très intimiste (la comédienne et le metteur en scène), la présence de spectateurs jouent beaucoup (de manière positive) sur le ton de même que sur la présence de l'interprète.

Enfin, il reste un point en suspens: la présence effective du texte à la scène alors que celui-ci s'incarne dans le papier... Béquille ou symbole? Un peu des deux... Il faudra songer sérieusement à le réintégrer d'une autre façon ou à s'en débarrasser. 

mercredi 11 décembre 2013

Du travail à la table...


Je ne suis pas, comme metteur en scène, un grand partisan de ce qu'on appelle le travail à la table (cette période où tous les artistes sont réunis autour du texte pour des lectures, des questionnements, du travail dramaturgique). Même si je reconnais que cet exercice peut être enrichissant, je n'arrive pas à m'y consacrer sans avoir l'impression de travailler dans le vide. Peut-être ai-je trop lu les écrits de Meyerhold qui affirme, avec conviction: Je n'aime pas le travail à la table. Je ne l'aime pas, c'est tout!

Derrière cette radicalité meyerholdienne se cache tout un raisonnement que je partage ici (tiré du petit fascicule Vsevolod Meyerhold publié en 2005 chez Actes Sud-Papiers... dans la collection Mettre en scène):

Pendant le travail à la table ne peut se produire qu'une entente entre le metteur en scène et les interprètes. Il est impossible d'entrer en scène avec assurance sur la simple base de ce qu'on a trouvé autour de la table. De toute façon, il faut presque tout reprendre depuis le début. Mais il reste souvent peu de temps pour cela: la direction vous presse. On a alors des spectacles bourrés d'erreurs sur le plan du rythme et de la psychologie. Et tout cela seulement pour être resté trop longtemps autour d'une table et s'être solidement habitué à ce qu'on a trouvé au cours de ce type de travail. Avec des metteurs en scène comme Sakhnovski, les acteurs, au fond, travaillent deux fois leur rôle: autour de la table et en scène, et ces deux méthodes se heurtent et se gênent l'une l'autre. Je conseille aux jeunes metteurs en scène de tâcher, dès le début, de répéter dans des conditions qui se rapprochent de celles du futur spectacle.

mardi 10 décembre 2013

«Trou Noir»... [Carnet de mise en scène]



Cette valise sur pied (en construction sur la photo... et dans mon atelier de la maison!) est l'un des rares éléments scéniques de Trou Noir (avec un manteau sur mesure et le système de lumières). Un élément qui ne représente que ce qu'il est: un support.

Un dernier enchaînement avant la première présentation publique. Un dernier enchaînement avec une comédienne enrouée. Un dernier enchaînement confortable, confiné à une intimité toute simple: un metteur en scène et son interprète.

Quelques entrevues (Radio-Canada et Le Quotidien) données ce matin ont ramené ce projet à ses débuts, aux premières aspirations. Que de temps depuis ces premiers mots écrits quelque part en mars 2010... Bien sûr, tout a évolué, pris de nouvelles tangentes. Mais dans l'ensemble, je suis bien satisfait de cette production.

Une production qui me sort des ornières des dernières mises en scènes et par le ton et le propos. Le discours m'y est très personnel... notamment en ce qui a trait aux préoccupations théâtrales.







mercredi 4 décembre 2013

«Merde!»


À quelques jours de la première de Sous le gui - 175 bonnes raisons de fêter la Noël - spectacle non-gratuit (dont c'est la générale ce soir!) et de Trou noir, voici un petit détour par le Dictionnaire de la langue française d'Agnès Pierron pour en lire la définition de ce célèbre mot prononcé avant une représentation:

M... ou Merde: Manière traditionnelle de dire à un acteur ou à un metteur en scène, le soir de la première: «Bonne chance!». Souvent, le mot s'accompagne de l'adjectif «gros»: «Je te dis un gros merde pour ce soir», «Envoyons un gros m...», peut-on lire sur les télégrammes glissés dans l'encadrement du miroir de la loge.

Certains chanteurs d'opéra demandent qu'on leur dise ce mot au moment de leur entrée en scène, accompagné d'un coup de pied au derrière. Le «M...» le plus célèbre du théâtre est le juron que prononce le père Ubu, personnage créé par Alfred Jarry (1873-1907): «merdre», qui, avec «cornegidouille» et «de par ma chandelle verte» ponctue le texte.

Signalons que les Anglais, eux, disent: «Rabbit, rabbit» ou «Break your leg» («casse-toi la jambe»), sous entendu: mieux vaudrait que tu te casses la jambe que de faire un bide, que de te ramasser un gadiche.. La langue allemande propose: «Hals und Bein Bruch» («la cassure du cou et de la jambe»). En français, le raccourci de la formule met en jeu le même scénario: celui de chuter, de prendre un billet de parterre, finalement de glisser sur une m... et de tomber. Mais chacun connaît la superstition liée au fait de marcher dans la m... du pied gauche: ça porte chance!

Qu'on se le tienne maintenant pour dit!

mardi 3 décembre 2013

«Trou noir»... [Carnet de mise en scène]


Voici qu'approche l'aboutissement (enfin, l'aboutissement d'une première étape!) de ce projet personnel qui a débuté au printemps dernier.

Il y a déjà longtemps que je n'ai présenté un texte personnel (nonobstant les productions de Noël du Théâtre 100 Masques qui sont écrits en cours de répétitions...): presque cinq ans. Déjà. J'ai donc très hâte de présenter cette production (quasi intime!)... même si, peut-être,  sera-t-elle perçue comme étant aride... voire hermétique. J'assume fort bien.

J'aime ses exigences. J'aime ses allers-retours entre les différents niveaux de réalité. J'aime le contrôle que ce texte commande. J'aime ce que nous en avons fait: un truc tout simple et pourtant fort complexe. Un point focal. Une voix. Sur une scène vide.

«Sous le gui - 175 bonnes raisons de fêter la Noël - spectacle non-gratuit»... [Carnet de mise en scène]

Photographie: Daniel Gauthier (Le Réveil/Journal de Québec)

La construction du spectacle de Noël achève. Il reste encore quelques babioles à bricoler, quelques accessoires à trouver. Mais l'ensemble prend définitivement forme. 

Lors des derniers enchaînements, nous en avions pour à peu près une heure de matériel. Une heure de folies qui doit maintenant trouver son bon rythme, son punch, son mordant.