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vendredi 26 janvier 2024

COMTESSE [Carnet de mise en scène]

 

En avril 2020, quelques jours après l'imposition d'un grand confinement national en plein chaos pandémique, j'ai écrit, dans la même veine d'une pièce antérieure (Madame, en 2005), une première version d'un texte qui deviendrait Comtesse - petits récits narcissiques et grand guignolesques. Comme un exutoire. Une autre façon de faire du théâtre... sans théâtre. 

À l'époque, j'étais plongé dans la lecture intensive de mélodrames, tous pétris de préciosité, de ces récits convenus, ces descriptions appuyées qui ont fait le succès du genre. Aussi se retrouve, dans mes pages, un relent certain de ces oeuvres désuètes: des personnages unidimensionnels engoncés dans un manichéisme qui n'est pas à leur avantage, avec une solide propension à parler et parler et parler! 

La création aura pris presque quatre ans à advenir. D'une part parce qu'il me fallait m'y investir... puis surtout parce que ça ne me tentait pas tant de revenir sur le sujet covidien.

Mais le temps passe! Et les désirs reprennent!

Après avoir choisi de programmer ce projet avec le Théâtre 100 Masques, je me suis attaqué à une réécriture importante durant l'été 2023. Une chirurgie syntaxique. Un ciselage des phrases. Un polissage des images. Parce qu'il faut savoir que ce texte repose principalement sur une exubérance verbale. Du coup, il y a, comme objet unique, une langue elle-même structurée, fortement théâtralisée. 

Après tout un jeu de ratures, de coupures, d'ajouts, de reprises, d'effacements j'en suis venu à la présente version. Quelle est est-elle? 

Comtesse, c'est un manifeste - sur un mode radical et arrogant - sur un essentialisme théâtral. Sur les bases fondamentales de l'art dramatique: la présence et la parole comme principal vecteur de la théâtralité.

Comtesse, c'est un défouloir contre les règles et les convenances dans un monde déliquescent (je rappelle le contexte qui présidait à l'écriture)! Le tout en cinq tableaux, comme cinq courtes fables sur le narcissisme épidémique qui s'étend de plus en plus, de l'extérieur vers l'intérieur.  Du monde vers soi... pour ressoudre en mal virulent. Le personnage est là et se dit. À quoi bon le reste?

Comtesse, c'est un pied-de-nez à la petitesse. Une envie du trop.

samedi 13 janvier 2024

Une première semaine au TAC!


C'est cette semaine que j'ai pris officiellement la direction du Théâtre Les Amis de Chiffon. Je suis parti, lundi matin, avec mon carton d'objets personnels (on ne déménage pas sans apporter sa tasse à café et ses pantoufles de travail faites par Sophie Châteauvert!) et mon trousseau de clés alourdi pour m'installer dans mes nouveaux espaces, pour faire mon intégration dans cette vénérable institution qui célèbre, en 2024, son demi-siècle d'existence! 

L'arrivée dans un organisme culturel - c'est ma cinquième expérience après le 100 Masques, la SALR, le Côté-Cour et le FMC - reste toujours pareille, avec la fébrilité de se fixer des objectifs opérationnels, la stimulation d'entreprendre un nouveau chapitre, l'enchaînement des projets dans la tête, la période un peu chaotique où tous les dossiers s'empilent et demandent une prise de possession rapide, la rencontre des collaborateurs et la mise en place d'un nouveau fonctionnement. Il y a aussi, dans ce cas, le poids d'être à la hauteur de l'Histoire du TAC et de ses générations d'artistes et de petits spectateurs... de quoi ficher de l'anxiété même au plus endurcis.

Alors j'ai triché pour avoir une entrée en poste performante!

Il faut savoir que comme tous les organismes culturels soutenus à la mission par le CALQ, le TAC doit déposer une nouvelle demande pour couvrir le prochain cycle (2024-2028). L'échéance approche à une vitesse grand V: le 1er février (ce qui me laisse, si mon compte est bon, 23 jours)!

Dès la confirmation de mon embauche, en décembre, je me suis donc attelé à trois tâches majeures: 
  • lire et faire le tri de quantité de documents liés au TAC (rapports annuels, documents constitutifs, états financiers, courriels de direction) pour avoir une idée du positionnement actuel de l'organisme avant de m'attaquer à la demande (qui comporte une bonne part de reddition);
  • établir une ébauche cohérente de programmation (d'objectifs) sur quatre ans pour savoir où je veux amener le TAC;
  • et enfin, budgéter la première année (2024-2025) - et prendre du coup la mesure des différents paramètres édictés par les grandes associations comme l'UDA, l'AQAD et l'APASQ - parce qu'il me faut m'assurer que mes projets soient viables financièrement. 
Depuis lundi donc (jour où s'est notamment tenu mon premier conseil d'administration pour faire approuver mes orientations et me donner les outils pour avancer), je suis dans la rédaction à temps plein. Mais je ne m'en plains pas: j'aime ce type d'exercice de rationalisation et de projection que je perçois comme une mise en scène de l'organisme où s'entremêlent forme (structure, organigramme, programmes) et contenu (projets, objectifs, discours), conception (manières de nous y prendre) et distribution (au sens large de qui fera quoi). Ça aura le mérite de m'avoir fortement imposé la réflexion du pourquoi de mon intérêt et de mes visées.

Finalement, les pages se noircissent allégrement, avec plus de facilité que ce que je craignais! 

Au point où je me suis même permis d'entreprendre une autre tâche importante: faire de la place (physique et mentale!) en triant les documents qui emplissent armoires, bibliothèques, classeurs et chemises pour faire éventuellement (et certainement) un dépôt d'archives! Cinquante ans, ça en laisse, des traces! Futile? Pas vraiment. Là aussi, c'est un labeur (presque nécessaire) qui m'intéresse et me plaît parce qu'il me permet une plongée drastique et fichtrement efficace dans les méandres de l'organisme, de m'en constituer - presque par osmose! - un bagage de connaissances intimes qui me serviront tout au long de mon parcours avec le TAC! 

Me voilà donc à mon premier weekend de ma nouvelle vie!

mardi 18 octobre 2022

[Carnet de mise en scène] Une nouvelle version scénique...


En janvier 2023, je donnerai - toujours avec le Théâtre 100 Masques - une troisième version scénique de ma pièce Les Mains anonymes (après une première version en novembre 2016 et une seconde en février 2018) racontant, en huit tableaux poétiques, les affres humaines d'une Médée qui se dit, mot à mot, dans toute sa virulence et son horreur.

J'y reviens parce que les circonstances (plus de détails à venir) m'ont fait revenir sur ce texte pour le peaufiner, le réviser. 

Et tant qu'à y être, l'envie de le reprendre en la scène a vite pris le dessus! 

C'est comme ça qu'hier s'est effectuée la première rencontre de travail avec une nouvelle comédienne et non la moindre - Guylaine Rivard! - qui succède à Erika Brisson.

C'est très stimulant de revenir à un projet et de lui redonner une nouvelle vie en faisant table rase des versions antérieures. 

Repartir de cette même écriture qui place le personnage dans une lancinante obsession. Dans un souvenir omniprésent et tétanisant.  Une redondance toute de tensions, de douleurs, de remords, de honte, de violence. Mais me donner la possibilité de retrouver une virginité scénique. De repenser le spectacle en fonction d'autres paramètres importants comme une nouvelle voix, un nouveau corps, une nouvelle présence. 

Une Médée palimpseste. 

La même... mais autre. Assurément.

Après cette première rencontre avec Guylaine où nous avons discuter de différents enjeux dramatiques, du texte et de ses implications, s'enclenchera bientôt l'exploration du jeu: quel phrasé? quel rythme? quel ton? quel volume? quel débit? quelle relation avec le spectateur? quel(s) geste(s)? quelle(s) action(s)? 

Et enfin, quelle esthétique?

Et c'est là où le théâtre commence tout doucement à poindre! 

Ça fera du bien de sortir de la comédie...!

samedi 24 septembre 2022

[Carnet de mise en scène] Un autre projet sur la table...


Avec l'automne qui vient de prendre ses quartiers, il faut maintenant s'atteler à une tâche beaucoup plus exigeante qu'il n'y paraît: concevoir le traditionnel spectacle de Noël du Théâtre 100 Masques! Le quinzième! Le défouloir par excellence d'avant les Fêtes! 

C'est, à chaque fois, une véritable création en concentré.

La première étape est de savoir avec qui ce travail se fera. Parce qu'il se moulera sur des personnalités, des dynamiques, des complicités. 

La seconde est d'avoir une idée générale de départ, un canevas, qui guidera la création sur une ligne narrative riche ou, à tout le moins, potentiellement inspirante! Pour l'édition 2022, c'est vers le conte La nuit avant Noël de Clement Clark Moore que je me suis tourné afin de placer ce spectacle sur le mode de l'attente intenable, de la fébrilité de quelque chose qui s'en vient, de l'espérance du lendemain... ouvrant la porte à tant de possibilités de quiproquos, de surprises, de contrariétés jouissives. 

Cette histoire (qui prendra peut-être 50% du temps de la représentation... soit environ 30-35 minutes) n'a pas la prétention d'être fidèle à l'originale... Elle se fait plutôt trame sur laquelle se grefferont des références cinématographiques de Noël, des références à l'actualité et surtout, des chansons. 

Les chansons parodiques de Noël sont associées à ces spectacles depuis le début. Elles composeront l'autre 50% de la représentation.  Le répertoire compte actuellement une trentaine de morceaux grinçants, grivois, drôles. Chaque année - et c'est la troisième étape! - j'en sélectionne une dizaine parmi celles existantes en essayant de varier d'une année à l'autre... bien que certaines reviennent régulièrement. Chaque spectacle en compte une douzaine... c'est donc dire qu'à chaque année, je garde de la place pour au moins deux nouvelles compositions.

La quatrième étape est de coller tous les morceaux ensemble: le texte - l'histoire - servira, en fait, de pont entre chacune des chansons jusqu'à la conclusion. Ici c'est le tricotage.

Soit à partir d'un simple plan avec une écriture en direct du plateau... soit à partir d'un plan, oui, mais en écriture collective avant les répétitions... soit, toujours à partir d'un plan, par l'écriture de la pièce en amont du travail avec les comédiens (c'est ce qui a été fait les deux dernières années... avec une pièce de départ qui, sera développée, rehaussée, travaillée à la scène avec les différentes propositions qui surgiront). C'est cette dernière option que je vais retenir encore une fois.

La cinquième étape, c'est la plus flamboyante et la plus épuisante (souvent à cause des rires à gérer): la création à proprement parler.  La mise en forme d'un spectacle d'environ 60 minutes. Le développement des personnages. Du bouillonnement d'idées. De l'aspect visuel à  déployer. C'est là où ça va vite. Trop vite. C'est là où c'est intense et concentré... parce que tout ça se passe sur quelques semaines à peine! 

Enfin, la dernière étape, ce sont les représentations toujours au nombre de trois. Bien que déjantées, se déroulant dans une ambiance festive aux arômes de biscuits et de chocolat chaud (parce que cette autre tradition est aussi maintenue depuis quinze ans!), elles n'en demeurent pas moins une partie du travail de la création. Avec de nombreux ajustements, de modifications, recherche d'impact. 

Voilà le fonctionnement de ces spectacles du Théâtre 100 Masques. J'en suis à peu près à la quatrième étape... le boulot m'attend.

jeudi 22 septembre 2022

[Carnet de mise en scène] Pour une dixième fois au Mic Mac...

 

Je signerai la mise en scène de la prochaine production du Mic Mac! Ma dixième mise en scène avec eux depuis 2004... Presque vingt ans de collaboration et d'accomplissements. 

Je le répète ad nauseam dès qu'il est question de cette troupe: c'est là où j'ai fait les projets les plus satisfaisants, les plus audacieux, les plus esthétiques. Comme un nouveau défi à chaque fois... où tous mettent la main à la pâte pour le relever. Avec Au bout du fil d'Évelyne de la Chenelière, avec La défonce de Pascal Chevarie, avec Les Reines de Normand Chaurette, avec Jouliks de Marie-Christine Lê-Huu et tant d'autres.

Ce qui démarque fortement le Mic Mac, c'est l'engagement profond de tous ses membres pour le théâtre. Leur puissant intérêt pour la chose dramatique. Leur curiosité culturelle. Leur désir de performer. Il y a là une surprenante émulation qui construit, sans que ça ne soit nécessairement conscient, un haut niveau de professionnalisme malgré la fausse étiquette de troupe amateure. De quoi foutre des complexes à nos compagnies saguenéennes... :) 

Mais plus encore. Avec le Mic Mac, c'est mon incursion pratique dans le répertoire québécois. Plus enclin à plonger dans le répertoire dit universel (de l'Antiquité au début du XXième siècle principalement), j'y trouve là de nouveaux terrains de jeux et d'explorations qui me sortent de ma zone habituelle. Outre mes propres textes, je suis rarement dans le répertoire contemporain. Et ça fait du bien...

M'y revoici donc. Après une absence de cinq ans déjà. 

Cette fois, c'est à une oeuvre de François Archambault parue en 2014 - Tu te souviendras de moi - que nous nous attaquerons. 

Archambault, c'est l'auteur notamment des pièces Cul sec (1993), Adieu beauté (1998) et La Société des loisirs (2003).

Le résumé général (celui qu'on retrouve partout sur internet et sur la quatrième de couverture) de cette pièce va comme suit: Un historien à la retraite commence à perdre la mémoire. Retiré de la scène, mais refusant de disparaître, il erre parmi ceux qui s'échangent sa garde. Une jeune fille rebelle lui fait revisiter un pan de son passé qu'il avait décidé d'oublier.

Pièce lumineuse ou pièce sombre? Cette construction dramatique est beaucoup plus étonnante qu'elle semble, de premier abord... et s'y dégagent plusieurs pistes de lecture possibles. Mon rôle, actuellement, est de me positionner, de lecture en lecture, pour créer un cadre cohérent, clair, inspirant. Tracer une ligne dramatique. (Re)Définir les personnages. Leurs liens. Leurs enjeux dramatiques. Trouver le fil que je tenterai de maintenir tout au long des répétitions. 

C'est la partie casse-tête de l'opération. Plein de morceaux disparates qu'il faudra rassembler éventuellement pour avoir un canevas efficace et fonctionnel.


mercredi 7 septembre 2022

Une année théâtrale chargée...

La saison 2022-2023 sera, de mon côté, théâtralement chargée. Le tout pourra sembler conséquent - et ça l'est! - mais ce n'est pas tant différent que les années précédentes où le théâtre prend, dans ma vie quotidienne (que je notamment entre trois organismes culturels), une place prépondérante. Et ce, tant dans la pratique que dans la lecture et la recherche.

Alors voici un peu comment mes prochains mois se déclineront....

Ça commencera avec UNE NUITTE AVANT NOËL... Ce sera là le 15ième spectacle de Noël du Théâtre 100 Masques. Une petite production (maintenant traditionnelle!) qui nous permet de nous éclater, d'écrire une histoire à même le plateau et la mise en scène, de retrouver notre répertoire de chansons parodiées qui allient grivoiserie et vision grinçante des Fêtes. Un petit intensif de jeu, de personnages, de cohérence.

Presque au même moment, je me lancerai dans la troisième version scénique - qui aboutira à la Rentrée hivernale - de mon texte LES MAINS ANONYMES, une version monologique du mythe de Médée qui sacrifie ses enfants sur l'autel de son amour ravagé. Un texte que j'apprécie particulièrement.

À l'automne je jetterai les bases (distribution et conception) de la pièce TU TE SOUVIENDRAS DE MOI de François Archambault que je mettrai en scène pour le compte du Mic Mac. Ce sera, du même souffle, mon dixième passage au sein de l'institution robervaloise au cours des vingt dernières années. Des retrouvailles, en quelques sortes...

Enfin, je terminerai par la production estivale 2023 du Théâtre 100 Masques qui porte présentement le titre temporaire de THÉÂTRE D'ÉPOUVANTE! C'est un retour, là aussi, à un répertoire que j'affectionne particulièrement: le Grand Guignol! Du plaisir, des rires et bien de l'hémoglobine sont au programme!

vendredi 7 janvier 2022

Les morts sacrilèges - genèse du projet


LES MORTS SACRILÈGES – CABARET TRAGIQUE est un projet de longue date pour le Théâtre 100 Masques, qui a connu de multiples évolutions depuis sa genèse. Un projet sur les traces de l’absolutisme des sentiments provoqués l’orgueil et de la trahison. Une quête de l’humanité dans toute son horreur.

Le projet prend donc son envol, sous une autre forme que celle envisagée.

D’abord, il y a quelques années, j'avais jeté mon dévolu sur le PHÈDRE de Racine. Lectures, analyses, ébauches de projet s’accumulaient… mais en vain. Il faut dire que le défi théâtral est important tant la forme est écrasante. Mais plus encore, dans ce récit par ailleurs fabuleusement écrit, les personnage d’Hippolyte et de son amante, Aricie, m'ont toujours parus superficiels, amoindris qu’ils sont dans une bête histoire d’amours contrariées. Les questionnements sur ceux-ci étaient nombreux.

Mes recherches m’ont donc mené vers les sources antiques du mythe, dont la version d’Euripide (écrite autour de 428 av. J.-C.). Dans celle-ci, titrée HIPPOLYTE PORTE-COURONNE, si Phèdre est toujours présente, le personnage pivot est justement le beau-fils en question. D’Aricie, aucune mention.  Il est montré dans toute sa splendeur : fougueux et fier, il n’a d’yeux que pour Artémis - déesse de la chasse -, refuse tout contact charnel et émotionnel avec une femme et, en ce sens, méprise royalement Aphrodite et ses disciples. C'est d'ailleurs pour ça que cette dernière - car oui, les déesses sont présentes et s'exposent - mettra en branle sa vengeance en instrumentalisant la pauvre belle-mère, déjà maudite par les antécédents de sa famille. Hippolyte est donc entier, tranchant, vindicatif, sans pitié. Devant lui, Phèdre succombe à sa passion et la fureur l’emplit. Du coup, les personnages acquièrent une toute autre dimension qui donne, à cette version, une cruauté troublante, féroce.

Après avoir parcouru plusieurs traductions de ce texte, il est vite apparu qu’aucune n’était tout-à-fait satisfaisante : souvent pompeuses, verbeuses, empêtrées dans une écriture désuète (celles que j'ai lues étant généralement écrites entre 1850 et 1900). C’est ainsi que l’idée de réécriture s’est imposée d’elle-même. Et plus encore, de travailler le texte de façon à pouvoir le faire porter par deux comédiens uniquement, dans une envie de créer une forte partition textuelle où l’interprète, de scène en scène, doit changer de rôles et revêtir les dynamiques soit du dominant, soit du dominé. Parce que dans ce jeu funeste qui se déploie, Phèdre, Hippolyte, Thésée, les déesses et même les serviteurs peuvent, au final, s’interchanger tant ils sont, au fond, pétris de ce même feu de l'orgueil qui couve et qui les consume inéluctablement. Effroyablement.

Sur une année (en 2017), j'ai, à partir des traductions existantes, recoupé le récit en 10 épisodes faisant alterner monologues et duos. Chaque réplique a été revue, comparée, sectionnée, allégée, minimalisée pour rester très près du squelette narratif, dans une ciselure quasi chirurgicale. Plusieurs passages, dont les choeurs, ont été gommés alors que d’autres ont été réécrits. (J'estime ainsi la proportion:  60% de texte original - si on peut dire - et 40% d'apport personnel.)

Une thématique s’est imposée d’elle-même tout au long de ce travail : le déchirement de l’intime sur l'autel de l'orgueil, chaque épisode étant ou une confession, ou une profession de sentiments, ou un repentir. Ce dévoilement, dans ses multiples formes, devient le véritable moteur dramatique, le déclencheur et le combustible de cette destruction annoncée.

Il en résulte un texte, LES MORTS SACRILÈGES, aux rythmes et syntaxes résolument contemporains, profondément rattaché aux échos de sa source antique d’il y a 2500 ans. Une partition énergique, prête à prendre vie avec vigueur et force. Et c’est à lui que nous voulons confronter nos expériences et nos envies scéniques!

Nous - moi et mon équipe de travail - en ferons donc une mise en lecture contemporaine très théâtralisée, aux allures d'un cabaret tragique!

Nous miserons sur cette forme parce que je crois fermement que la thématique de ce projet, telle que définie plus haut, trouvera, dans un tel contexte (présenté à l’Espace Côté-Cour,) peu conventionnel pour ce type de texte, un écrin intimiste, une proximité avec le public qui ne pourra que le servir. 

D’emblée, le cabaret vient avec un potentiel artistique puissant, décomplexé qui déconstruit et reconstruit ses propres codes, étalant également l’aire de jeu jusqu’à la salle. Chacun des dix épisodes de la pièce LES MORTS SACRILÈGES pourra, indépendamment des autres, trouver sa résolution scénique, en faisant intervenir différents moyens :
  • l’usage d’accessoires (objets, vêtements, mobilier);
  • l’usage de lumières de différentes origines (chandelles, torches, lampes, spots, blacklights, etc.);
  • l’usage de projections (que ce soient des images filmées spécifiquement pour ce spectacle, ou d’extraits de films, ou de créations numériques);
  • la création d’espaces sonores par la conception ou l’usage de micros et de programmes de transformations vocales.
Il ouvre ainsi un cadre de création qui allie efficacement le jeu traditionnel à la performativité contemporaine… essentiel à ce type de production syncopée, où les interprètes porteront plusieurs personnages, à coups de transformations à vue, de travail physique et corporel, d’accessoires évocateurs, d’effets produits par les technologies.

Il va sans dire qu’un jeu de monstration sera privilégié, rhapsodique. Une quête de virtuosité pour les comédiens qui devront passer d’un état à un autre avec justesse, avec célérité et efficacité.

Qui dit cabaret dit aussi forte présence musicale. Si les choeurs de la version originelle sont disparus, le projet LES MORTS SACRILÈGES – CABARET TRAGIQUE fera tout de même intervenir – tant entre les épisodes qu’ à l’intérieur d’eux - une autre entité, musicale et sonore!, ayant pour objectif de porter un point de vue extérieur sur l’action, les personnages, les enjeux dramatiques. 

Voilà ce que je veux faire avec ce projet.

Ainsi, au lieu de la constitution d’un univers scénique unique, LES MORTS SACRILÈGES – CABARET TRAGIQUE convoquera plutôt un cadre alternatif aux possibilités multiples qui prendra place, avec, sous-jacente, l’hybridation des genres, des formes. Et c’est comme ça que le Théâtre 100 Masques télescopera à nouveau l’Antiquité avec le monde d’aujourd’hui, pour faire vibrer à nouveau le spectateur, le frapper de plein fouet avec cette histoire dont on n’en a jamais assez!

29, 30 et 31 mars 2022, 20h
Espace Côté-Cour
Textes, mise en scène et conception générale: Dario Larouche
Comédiens: Erika Brisson, Bruno Paradis
Environnement sonore: Gabriel Gagné Gaudreault

mercredi 5 janvier 2022

Les prochains mois au Théâtre 100 Masques


2022 débute à peine que déjà le calendrier du Théâtre 100 Masques - que je dirige aussi - se remplit d'activités de toutes sortes... dans un contexte pandémique et sanitaire qui lui, peut toutefois entraver les bonnes intentions!

Il y aura d'abord, dès que nous le pourrons, ouverture des inscriptions pour une session d'ateliers réguliers (de dix semaines), destinée aux jeunes de 8 à 14 ans.

Le 27 février, je présenterai une édition spéciale de L'Heure du Théâtre, en collaboration avec les Bibliothèques publiques de Saguenay, consacrée aux différentes versions de Phèdre dans l'histoire théâtrale, de l'antiquité à nos jours (Euripide, Sénèque, Robert Garnier, Jean Racine, Jacques Pradon, Sarah Kane). Cette activité mettra la table au projet suivant.

À la fin mars (les 29, 30 et 31), le Théâtre 100 Masques présentera, au Côté-Cour, Les Morts sacrilèges, une mise en lecture fort théâtralisée sous forme d'un cabaret tragique, du texte du même nom que j'ai écrit à partir de plusieurs traductions de l'Hippolyte porte-couronne d'Euripide (et de mon propre apport également!). Deux comédiens, un musicien, et une version cruelle du mythe de Phèdre.

À la même période, ce sera l'ouverture des inscriptions de nos Camps de théâtre thématiques 2022, qui sont toujours une importante activité dont les résultats sont toujours fort surprenants:

Semaine 1 – Dans l’univers de…
Groupe 7-8 ans – … Calderon (La vie est un songe)!
Groupe 9-10 ans – … Shakespeare (Richard III)!
Groupe 11-12 ans – … Maïakovski (La Punaise)!
Groupe 13-15 ans – … Cocteau (La voix humaine)!
 
Semaine 2 – Explorons…
Groupe 7-8 ans – … le mime! (avec son corps comme matériau)
Groupe 9-10 ans – … la revue théâtrale! (avec ses numéros sur l’actualité)
Groupe 11-12 ans – … la tragédie classique! (avec les vers et les mythes)
Groupe 13-15 ans – … les contes urbains! (les récits un peu étranges)

Le 10 avril, je présenterai une seconde édition spéciale de L'Heure du Théâtre, toujours en collaboration avec les Bibliothèques publiques de Saguenay, cette fois consacrée à Goldoni, sa vie et son oeuvre, en marge des répétitions de la production estivale 2022.

Car oui, ce 23ième théâtre d'été se fera sous le patronage de Carlo Goldoni. J'ai deté mon dévolu sur la pièce Un curioso accidente (le titre français est souvent La plaisante aventure) qui sera présentée au Côté-Cour pendant tout le mois de juillet et qui s'inspirera de la commedia dell'arte avec une équipe de comédiens débordante d'énergie.

Bref, toutes ces équipes seront fort occupées!

mercredi 29 décembre 2021

Une commedia dell'arte revisitée!

Comme production estivale 2022, le Théâtre 100 Masques présentera, pour la seconde fois de son histoire (après La Serva Amorosa en 2004) une pièce de Goldoni: Un Curioso Accidente. Une pièce avec un fort potentiel comique à propos de l'orgueil mal placé. C'est dynamique, avec de multiples chassés-croisés qui font s'accumuler les quiproquos. 

Oui, il est un peu tôt pour penser à l'été alors que nous entrons à peine dans l'hiver. Mais il y a une bonne raison! 

J'ai reçu, il y a quelques jours, un colis bien attendu (depuis 6 mois déjà)... à savoir une collection de sept masques, conçus à Montréal, inspirés de personnages de la commedia dell'arte.





Car oui, c'est vers le jeu masqué que je compte aller. Vers un jeu résolument physique, lui aussi inspiré de la commedia... sans chercher pour autant l'authenticité historique du genre. Un spectacle chorégraphique. Fort proche de la biomécanique. Encore. Mais cet accessoire portera peut-être l'expérience ailleurs... qui sait!

Avec les comédiens, nous élaborerons nos propres codes, nos propres conventions, bref, notre propre cadre. 

Je veux que ça bouge. Je veux que ça grince. Je veux que ça surprenne. Je veux que ça étourdisse. Je veux que ça éblouisse.

dimanche 21 février 2021

Le mélodrame... «tragédie des pauvres»


Je continue de lire, par temps perdu, des mélodrames. Voici comment ceux-ci sont définis dans l'Encyclopédie Universalis:

Le mélodrame est un genre décrié. Sa réputation a été grande [...].De nos jours, le mélodrame « est victime d'un reproche majeur et général : il est populaire, boulevardier, vulgaire ; c'est la tragédie du pauvre ou le drame du pauvre », écrit P. Frantz, qui ajoute : « Il n'est décrit qu'à travers deux figures si fréquentes de l'histoire littéraire, celle de la décadence et celle de l'enfance ; il est décrit tantôt comme l'ultime décadence de la tragédie, [...] tantôt comme l'enfance du drame romantique. »

Voilà, je trouve, une fort bonne entrée en matière qui repositionne ce genre dans son fil historique théâtral: genre charnière, genre de transition.

Le Dictionnaire encyclopédique du théâtre de Michel Corvin précise: [...] Ce théâtre visuel d'inspiration romanesque comble en trois actes l'attente d'un public élargi en jouant savamment sur les effets violents et conjugués du pathos et du spectaculaire. Les nombreuses péripéties et la richesse d'une mise en scène minutieuse (dirigée par l'auteur) servent la simplicité d'un argument moral toujours identique: la vertu persécutée puis récompensée, le crime châtié. Qu'ils soient de tonalité historique [...], qu'ils narrent un drame bourgeois [...], des aventures mouvementées [...] ou une enquête criminelle [...], ces mélodrames suscitent d'extraordinaires enthousiasmes.

Des mélodrames, donc, j'en lis plusieurs.

Et justement, je lis particulièrement ceux du nommé René Charles Guilbert de Pixérécourt, surnommé aussi le Corneille du mélodrame. Il est l'incontournable, le Maître. Ses oeuvres - nombreuses: il a écrit 111 pièces qui auraient été jouées plus de 30 000 fois! - sont considérées comme étant les plus typiques. Et si ses dernières pièces (autour de 1820-1830) semblent proches du romantisme  qui bat alors son plein, il se défend bien d'appartenir à ce nouveau courant.

J'ai lu récemment de lui (et ses titres :
  • Le Mont Sauvage ou le solitaire;
  • L'homme à trois visages ou le proscrit;
  • Le monastère abandonné ou la malédiction paternelle;
  • La chapelle des bois ou le témoin invisible;
  • Le Belvéder ou la vallée de l'Etna;
  • La fille de l'exilé ou huit mois en deux heures.
C'est là du théâtre profondément manichéen qui donne une fort bonne illustration de la notion des emplois au théâtre: l'ingénue, les amoureux, le noble, le traître, le valet, etc. 

Je lis avec un plaisir à chaque pièce renouvelé... avec, en tête, une idée encore vague de ce que je compte en faire. Mais projet il y aura assurément tant la matière est riche et intéressante. 

mercredi 20 janvier 2021

En route pour une nouvelle production.

Cet hiver, je suis le titulaire de la charge de cours 7THE505 à l'UQAC... soit le cours Création théâtrale (six crédits) où un metteur en scène fait une production avec les étudiants. Pour ma part, ils seront six. 

Et voici la proposition que j'ai faite et à partir de laquelle nous travaillerons:

Drôle d’époque que la nôtre. Les changements climatiques, la pandémie et sa radicalisation qui rejette la science, les problèmes mentaux, les soubresauts politiques, la violence partout… tout concourt à générer de l’angoisse, voire même, parfois, de la terreur. 

Dans le cadre de la création théâtrale, je compte mettre ces sentiments en parallèle avec un genre spécialisé du théâtre : le Grand-Guignol. Spécialisé parce qu’il cristallise l’angoisse de son époque (la fin du XIXe et le début du XXe siècle) et porte, en lui-même, les mêmes craintes que nous pouvons reconnaître : la peur des éléments de la nature, des savants, de la folie, des dirigeants, de la cruauté humaine. Il exploite délibérément toutes ces ficelles pour établir ses propres codes qui feront la part belle aux extrêmes et à la sensualité. 

Ce sera donc une plongée dans un répertoire quasi oublié, parfois méprisé dont l’unique objectif était de susciter des émotions fortes, de faire ressentir les effets de la peur! Un peu un ancêtre des films de séries B, rempli d’hémoglobine, d’effets spéciaux… 


Plus précisément, nous travaillerons sur un texte d'André de Lorde (une adaptation d'une nouvelle d'Edgar Allan Poe), Le système du docteur Goudron et du Professeur Plume, et sur un ou deux autres petits textes.

Et le contexte actuel? 

Le cours se donnera en personne - presque un luxe! -, dans ce laboratoire qu'est le Petit Théâtre. La distanciation est de mise. Et assumée comme outil de tension. La diffusion devra se faire en fonction du web. Et là se posera le véritable défi de ce projet. Comment surpasser la simple captation? Augmenter le potentiel de cette diffusion?

L'exploration sera de mise! Pourtant, quelques pistes sont déjà établies...

L’une des caractéristiques essentielles de ce type particulier de théâtre est de placer le spectateur sur le qui-vive, dans une position de voyeur, dans un jeu constant de dissimulation et de monstration... dans de fréquentes bascules de points de vue.

La création de cette année  jouera à fond sur ce point et intégrera, à la mise en scène, tout un jeu de caméras subjectives portées par les interprètes qui permettra à des spectateurs-webs, sur une plateforme à définir, d’avoir accès à tous ces points de vues, et de passer de l'un à l'autre au gré de leur intérêt. Si le contexte le permet, des spectateurs pourront être intégrés dans le lieu même.

Du coup, cette production se fera sur un mode éminemment immersif. 

Tel est le projet à venir! Rendez-vous à la fin d'avril! 

mercredi 16 septembre 2020

«Dix Huis-Clos et +» en générale!

Nous serons en générale, ce soir, pour le projet théâtral concerté Dix Huis-Clos et +. Un retour en scène avec mes collègues après plusieurs mois d'arrêt. Un retour certes encadré par de nouvelles mesures sanitaires contraignantes... mais néanmoins retour! 

Retour de la camaraderie (bien que distanciée et masquée). Retour des différentes visions du théâtre, des différentes pratiques, des différentes aspirations. Retour des projets esquissés pour plus tard. Retour des potins de coulisses! 

Pendant ce temps, le Côté-Cour voit ses espaces occupés dans leurs moindres recoins. Ça bruisse. Ça bourdonne. Ça rit. Ça se questionne. Et petit à petit, dix univers - et tout autant de propositions esthétiques! - se sont installés tout au long d'un parcours déambulatoire:

Détail de l'un des panneaux confectionnés par Sophie Châteauvert
 pour La Confession Margot (une farce du XVIe siècle) présentée par le Théâtre 100 Masques.

Depuis six mois, le milieu théâtral régional s'est mis sur pause. Alors la fébrilité qui nous anime aujourd'hui à imaginer la rencontre très prochaine avec nos spectateurs est très grande! 

Ce soir, générale...

Étrangement, tout collectif soit-il, ce projet voit chaque équipe relativement isolée et nous n'aurons pas la chance (du moins, dans cette première série de représentations qui débutent) de voir ce que font les autres! Mais ce n'est que partie remise! 

17-18-19 septembre 2020 - Côté-Cour (Jonquière) - Billets
24-25-26 septembre 2020 - Centre des arts et de la Culture (Chicoutimi) - Billets
1-2-3 octobre 2020 - Théâtre du Palais Municipal (La Baie) - Billets

Il y a 10 départs (quatre spectateurs à la fois) à partir de 19h30 (un départ à toutes les 10 minutes). C'est donc dire que le nombre de places est limité! C'est pourquoi nous vous invitons à acheter votre billet!
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Un projet du Groupe de compétence en théâtre de Culture Saguenay-Lac-Saint-Jean qui est rendu possible grâce au soutien de la Ville de Saguenay et du Ministère de la Culture et des Communications du Québec.

samedi 29 août 2020

Les archives théâtrales saguenéennes

 

Le théâtre est éphémère et du coup, sa mémoire (à long terme) pose un sérieux défi de conservation. De décennies en décennies, que de noms, que de troupes, que de projets sombrent dans l'oubli.

Pourtant, chaque projet, chaque production, chaque événement laisse dans son sillage des documents papiers (photos, affiches, programmes, croquis, budgets et demandes de subventions), un dossier de presse, une captation. Souvent, tout est là: de l'idéation à la réalisation en passant par les crédits des artistes et partenaires. Une solide mine d'informations plus souvent qu'autrement inaccessible (parfois inconnue quand il s'agit de spectacles plus anciens)... ou, à tout le moins, dispersée! Une partie de celle-ci est assurément disparue...

Le tout est rangé tant bien que mal dans des classeurs, des boîtes... chez d'anciens participants (pour les troupes aujourd'hui disparues) ou au sein d'organismes qui manquent de plus en plus d'espace. Et le temps fait son oeuvre... aidé parfois par des envies de ménage et de soulagement spatial!

Chacun (artiste et organisme) pourrait s'ouvrir un fonds d'archives, il va de soit. 

Mais il pourrait aussi y avoir plus... 

J'ai déjà évoqué (et d'autres aussi) la création d'un fonds d'archives pour le théâtre régional (ceci dit, il en existe déjà certains). Un fonds d'archives constitué en concertation. Un fonds d'archives créé et entretenu par des professionnels, dans des conditions professionnelles. 

Dans un monde idéal, ce fonds pourrait contenir de multiples sources:

  • de nombreux documents: photos, affiches, programmes, croquis, budgets et demandes de subventions, captations (sur différents supports dont plusieurs seraient à numériser!);
  • ceux des troupes anciennes (plus difficiles à récolter, mais certaines personnes ont encore de ces éléments au fond d'un album ou dans une boîte à souvenir);
  • ceux des compagnies actuelles, actives ou non;
  • ceux d'artistes indépendants et de concepteurs;
  • ceux des institutions scolaires (université, cégeps, séminaire, polyvalentes);
  • des entrevues avec des artisans, des artistes de la première heure pour garder une trace tangible de l'histoire;
  • des artéfacts (comme des costumes significatifs, des accessoires remarquables, des maquettes);
  • une liste faisant la recension de fonds théâtraux déjà existants et les liens pour y accéder.

Le but serait d'abord de réunir une masse d'informations (la plus exhaustive possible) sur le milieu théâtral régional tout en permettant une préservation optimale des souvenirs d'un milieu dynamique. Par la suite, par son accessibilité, ce fonds serait disponible pour les chercheurs, les historiens intéressés à dresser l'évolution de la pratique théâtrale ici en région éloignée... à tracer les contours de sa professionnalisation, par exemple... Enfin, d'un point de vue romantique (!), ce serait aussi donner à ce qui se fait aujourd'hui et ce qui se fera demain, un ancrage historique, une continuité.

Comme artistes, comme praticiens, comme organisations, il est de notre responsabilité de nous assurer de mettre en place les mécanismes nécessaires à une transmission de la mémoire théâtrale...

jeudi 27 août 2020

De retour au Moyen Âge!

Ce matin, je reprends le chemin des vraies répétitions!

Et c'est sur un matériel dramaturgique que j'apprécie beaucoup que ce retour se fera! Pour l'occasion, pour le projet en question, je travaillerai sur La Confession Margot, un texte anonyme daté du début du XVIe siècle. Cette (relative) courte farce médiévale réunit des éléments récurrents du genre: la parodie du curé, la confession naïve, le mélange d'obscénité et de lubricité! Le sujet: la luxure péché mortel!

Le Margot du titre serait le nom du personnage... mais serait également le diminutif de Marguerite, nom donné, semble-t-il, aux personnages féminins de moeurs légères. Ca donne le ton... 

C'est cru. C'est osé. C'est drôle. 

Un travail de présence. De rythme. De respirations et de sens du punch

Il est toujours étonnant de revenir à ces pièces comiques du Moyen Âge pour mesurer, au final, le peu de décalage entre ces univers déjantés, permissifs, disgressifs... et le monde de l'humour et de la comédie d'aujourd'hui!

jeudi 28 mai 2020

Défi des «10 productions marquantes»

Depuis quelques semaines, sur Facebook, le défi artiste/performance où il faut présenter 10 photos de soi, sans explication.

J'ai choisi de faire une variante: choisir dix productions marquantes (en faisant abstraction de toutes les autres!) mais surtout, expliquer pourquoi elles le sont sinon l'exercice me semble bien incomplet! 

Alors voilà:

1 - IPSO FACTO - COURTEPOINTE DÉSAMOUREUSE (Théâtre 100 Masques, mars 2001)


Loin d'être mon meilleur texte... mais cette production restera toujours marquante: c'est ma toute première mise en scène et mon tout premier projet avec le Théâtre 100 Masques que je venais de joindre à l'automne précédent.

2 - LE CHOEUR DU PENDU (Théâtre 100 Masques, octobre 2003)


De tous mes textes, l'un des plus satisfaisants. Qui coìncide aussi avec le début de ma maîtrise (bien qu'il n'y ait aucun lien). Un premier travail choral qui lance toute une exploration de ce mode théâtral qui reviendra à de nombreuses reprises!

3- AU BOUT DU FIL (Théâtre Mic Mac, avril 2004)


Ma première incursion au Théâtre Mic Mac... avec un texte étrange qui a donné, avec le recul, ma mise en scène la plus «expérimentale». C'est la pierre d'assise d'une relation avec un milieu théâtral qui a participé à mes plus belles expérimentations.

4- LES REINES (Théâtre Mic Mac, avril 2007)


Encore au Mic Mac, l'un des plus beaux défis - avec une magnifique équipe - sur l'un des plus beaux textes du répertoire québécois. C'est aussi la première fois que je me suis réellement attaqué à une oeuvre «sérieuse».

5- LA DÉFONCE (Théâtre Mic Mac, avril 2010)


Que dire que je n'ai déjà dit sur ce spectacle... C'est là l'expérience et la proposition la plus audacieuse, la plus grisante, la plus enrichissante, la plus troublante et la plus «sereine». L'impression d'avoir atteint un sommet. Et vivre depuis avec une forte nostalgie artistique et l'objectif de retoucher ce moment de grâce. 

6- L'ASSEMBLÉE DES FEMMES (Théâtre 100 Masques, juillet 2010)


Là aussi, d'une certaine façon, l'un des spectacles audacieux et des plus fous de ma liste... et un plaisir fantastique de plonger dans ce texte antique qui ne recule devant aucune grossièreté avec une distribution toute féminine!

7- ORPHÉE AUX ENFERS (SALR, février 2013)


Orphée marque le début de mon association avec la SALR qui durera quelques années. Première oeuvre lyrique, premier spectacle d'envergure (dans une esthétique que je trouve encore parmi les plus réussies), rencontres exceptionnelles avec des choristes, des solistes, des accompagnateurs, un chef d'orchestre!

8- LA FILLE DU TAMBOUR MAJOR (SALR, février 2014)


Un peu comme la précédente, cette production a surtout été marquée par des rencontres avec toute une équipe artistique! Que de plaisir en répétition! Un des spectacles où, comme metteur en scène, je me suis le plus amusé. Un spectacle bonbon! 

9- LE REVIZOR (Théâtre 100 Masques, juillet 2015)


Parfois, un texte comme celui-là trouve sa raison d'être dans un contexte qui accentue son déploiement. Un texte que j'ai longtemps lu, relu, travaillé pour permettre une production. Comme un aboutissement attendu. De beaux personnages! Et une distribution fantastique encore là. 

10- LES MAINS ANONYMES (Théâtre 100 Masques, novembre 2016)


Ah. C'est l'équivalent de La Défonce. L'impression d'avoir atteint un sommet littéraire (bon, il faut nuancer l'effet pompeux de la déclaration!) et une maîtrise de sa mise en scène. Puis l'interprétation en était magistrale. Une oeuvre que je reprendrais encore et encore et encore.


Voilà.

Mais encore une fois, je laisse de côté de nombreux autres projets qui m'ont stimulé d'une façon ou d'une autre et qui m'ont procuré de beaux moments artistiques.



lundi 27 avril 2020

L'union du milieu théâtral régional... une initiative complexe

L'histoire théâtrale régionale renferme une multitudes de noms (connus et moins connus, encore dans les mémoires - et en action! - ou oubliés), de troupes... et d'initiatives de rassemblement et de traçages d'un portrait des forces vives.

(Et il serait bon, d'ailleurs, de collecter les témoignages des gens qui y étaient!)

Parmi celles-ci, une est plus importante que les autres, il me semble, tant par sa présence dans les journaux que par ses démarches, ses objectifs, ses propositions: Promotion théâtre

Milieu des années '70. La scène régionale bouillonne, portée par la vague du théâtre amateur, du théâtre engagé, de la création collective. Une équipe de cinq personnes (dont le porte-parole sera Roger Malaison que j'ai connu alors qu'il dirigeait L'Atelier de théâtre L'Eau Vive) obtient du fédéral une subvention pour créer Promotion théâtre.

Le 7 décembre 1975, le Progrès-Dimanche explique le projet:


Donc, trois objectifs sont poursuivis. Il y aura tout d'abord la création d'ateliers. Puis la mise en place d'une banque d'informations, d'un répertoire... de l'établissement d'un portrait. Enfin - et ce sera l'un des points importants du projet si on en croit le papier - la création d'un regroupement du milieu théâtral (dédié principalement à la promotion). 

C'est un projet intéressant. Qui aurait dû stimuler le milieu théâtral. Toutefois, il semble que cette initiative soit difficile à réaliser. On parle, dans l'article de quatre tentatives antérieures... et je sais qu'il y en aura une ou deux autres par après, au début des années '80.

Alors, à cette époque, qu'en pense-t-on? Le Progrès-Dimanche apporte une réponse, le 18 janvier 1976:


Les réticences sont manifestes. Pourquoi? Il n'y a pas vraiment de pistes données. Tensions dans le milieu? Possible. Projet trop ambitieux et trop dispersé? Peut-être. Craintes de voir un organisme prendre trop d'importance? Probable. 

Le 21 mars 1976, le Progrès-Dimanche publie un autre petit article sur Promotion Théâtre... mais cette fois, il y est question d'un festival et surtout de la collecte d'informations (qui sera la part la plus importante du projet finalement).


Qu'advient-il de l'idée de regroupement? L'idée germe-t-elle? Rien n'est moins sûr. Le 30 mai 1976, le Progrès-Dimanche publie un entrefilet plutôt équivoque:


Le temps avance et le projet PIL tire à sa fin (et entraînera la disparition de Promotion théâtre) et laissera, à défaut d'un regroupement, un portrait régional des différents secteurs du milieu théâtral tel que l'annonce le Progrès-Dimanche le 13 juin 1976:


Le 20 juin 1976, le journal fait un (sévère) retour sur la présentation du rapport du projet PIL. Mais surtout, il revient, en dernière partie de l'article sur le désintérêt du milieu théâtral pour un regroupement, avec, en filigranes, quelques hypothèses pour expliquer la chose.


Cette petite histoire est intéressante pour plusieurs points. D'abord, elle dresse quand même un portrait de milieu des années '70, de ses différentes dynamiques, de ses enjeux. Mais fondamentalement, elle pose la question du regroupement .

Aujourd'hui, en 2020, un projet de regroupement régionale, d'association, serait-il viable ou se ferait-il catalyseur de tensions diverses? Bien sûr, il y a le groupe de compétence en théâtre de Culture Saguenay... mais pourrait-il y avoir de l'espace pour une entité officielle, représentant politique, porte-parole et porte-étendard du milieu? 

jeudi 26 mars 2020

Texte en cours!


Le confinement a ça de bénéfique: il peut ouvrir une brèche où la fiction peut poindre et se déployer sur des dizaines de pages. 

Depuis quelques jours déjà, je suis entré presque accidentellement en période de création. Sur un filon qui trouve des échos dans plusieurs de mes textes antérieurs... que ce soit Le choeur du pendu, MADAME, Trou noir ou Empire... Comme une communauté de pensée - une obsession - qui les lie.

Une pièce, donc, est en cours. D'un tout autre style que les plus récents... avec un retour à une certaine prolixité!

Un premier jet a été rapidement rédigé. La partie la plus facile (et, au final, la moins stimulante). Comme pour mettre en place les idées générales, le chemin dramatique, le ton. Un plan, en quelques sortes, très détaillé, il va sans dire... mais quand même un plan. La version originelle! 

Mais de là le véritable travail d'écriture commence. Celui qui me passionne. Celui qui s'étirera sur plusieurs jours, plusieurs semaines... voire plusieurs mois. Entre deux pauses, deux autres projets. Sans échéance d'une production. 

Un travail par couches successives... une écriture quasi palimpseste. Une écriture par protubérances et enflures! Une écriture comme une oeuvre peinte... par petites touches, par ajouts... comme pour donner une impression, une couleur d'ensemble. Une écriture qui repart très souvent de la première ligne pour repasser sur l'ensemble. Des lectures innombrables. Pour valider le cadre. Le rendre efficace et cohérent. Corriger les détours du récit. Approfondir les enjeux. Redresser les lancées verbales. Insérer des leitmotivs, des boucles, des motifs. Peaufiner les liens d'un tableau à l'autre. Rechercher le mot juste, le mot étonnant. Façonner les expressions. Construire les images mentales. Ciseler le rythme du phrasé et de la respiration.

dimanche 2 février 2020

EMPIRE, la genèse d'un projet

Il y a parfois des projets qui semblent sortis de nulle part. Comme cette création du Théâtre 100 Masques qui prendra l'affiche dans un peu plus d'un mois.

Depuis quelques années, je caresse le projet de travailler sur une production de Phèdre. Oui... la version de Racine. Mais aussi - et surtout pour le projet en question - celle d'Euripide, centrée sur la version du beau-fils: Hyppolite porte-couronne (écrite en -428 avant JC). 

J'ai élaboré, en 2016-2017, à partir de diverses traductions et une bonne part de réécriture, une partition pour deux comédiens: Les morts sacrilèges, qui fait s'entremêler les voix des différents protagonistes (Phèdre, Hyppolite, Thésée, les déesses, Théramène, la servante) en de longs récits. Ce texte est, je crois, intéressant... mais en même temps, il lui manque encore un quelque chose.

J'ai alors cherché de nombreux textes autour de ce mythe... principalement dans les textes antiques.

Et le projet a peu à peu bifurqué. 

En lisant sur tout et rien, je me suis attardé aux grandes figures d'autorité dans l'Antiquité... jusqu'à l'empereur Néron... Fascinant personnage. Une courte phrase me revenait toujours en tête: Brûle mon empire, brûle. Plutôt anodine et en même temps bien rythmée. Puis je me suis mis à écrire un monologue dit par le tyran... plus ou moins convaincant. Je l'ai abandonné... vite entré dans le cul-de-sac historique. Mais de lui, resta l'envie de décrire la déchéance d'un empire (!) jusqu'à sa destruction par le feu. Et pas nécessairement l'empire romain.

Après avoir écrit une première ébauche de quelques pages, je me suis fait un plan. Détaillé. Et c'est comme ça que l'écriture a pris son envol, assez rapidement, à l'été 2018, fortement inspirée par l'actualité mondiale d'alors: catastrophes naturelles, humanitaires, épidémiques, politiques... de quoi décourager, foutre le cafard, l'angoisse et l'anxiété à n'importe qui. Le ton était donné.

En résulte donc un long récit. Une chaîne irréversibles d'engrenages malsains et apocalyptiques. Une suite de fatalités de plus en plus catastrophiques. Une conséquence de choix arbitraires. Une extinction. Puis une autre voix s'est insérée pour faire un contrepoint. Un regard extérieur, supérieur. Insensible. Aveuglé par sa suffisance et son ambition. 

En tout, il y a eu 4 versions en quelques semaines. Chacune apportant son lot de modifications (parfois importantes!), de ratures, de réécritures, de modifications substantielles à la rythmique du texte, au vocabulaire, au style. 

Une première création devait être faite l'an dernier. Mais d'autres projets m'ont contraint à le repousser. Et entretemps, j'ai revu la forme. Le texte est passé de deux voix distinctives (qui imposait une relation trop claire et manichéenne) à trois voix interchangeables, liées et en compétition, avec, comme champ de bataille, une cité et un peuple otage de décrets tous plus insensés les uns que les autres, au profit d'une économie dominatrice et dévastatrice.

De Phèdre, plus rien... mais ce n'est que partie remise.

Voici donc comment est arrivé Empire. Comme une recherche. Comme un défoulement. 



vendredi 17 janvier 2020

Nouvelles acquisitions... grandguignolesques!

S'il est un genre qui me fascine, au théâtre, c'est bien ce Grand Guignol: théâtre des extrêmes de la fin du XIXe et du début du XXe siècle, théâtre des angoisses devant la science, de cette transformation du monde. On l'appelle le théâtre de l'épouvante

Assurément que ce blogue se verra agrémenter, dans les prochains jours prochaines semaines, de références à celui-ci... parce que je viens de recevoir, par la poste, deux ouvrages sur le sujet, abondamment illustrés.

D'abord celui-ci, d'Agniès Pierron (celle-là même qui a fait le très intéressant Dictionnaire de la langue au théâtre... que je n'ai toujours pas...) publié en 2002:



Puis celui-là - que je connais déjà pour l'avoir feuilleté à de nombreuses reprises à la Bibliothèque de l'UQAC - publié en 1979... lui aussi avec moult photographies et affiches:



La poste devrait m'apporter encore, dans les prochains jours, deux recueils de textes d'André de Lorde, le maître du genre. 

Ce stockage n'est pas innocent. 

En 2017, le Théâtre 100 Masques a présenté, au Côté-Cour, en compagnie du Quatuor Saguenay, trois lectures de pièces tirées du répertoire du Grand Guignol. Depuis, j'ai très envie de me plonger plus 
à fond dans l'exploration du genre, dans une production professionnelle... Quand? À voir...



mercredi 7 septembre 2016

Une année en 5 mises en scène!

Quand la saison 2016-2017 sera terminée - après, bien entendu, qu'elle ait franchement commencé! - j'aurai signé cinq mises en scènes. Une saison bien remplie... comme un pentathlon...

La première échéance est pour le début du mois de novembre, avec le projet Les Mains anonymes, une création du Théâtre 100 Masques avec, comme point de départ, le mythe de Médée. Déjà quelques billets ont été publié sur ce blogue à ce sujet parce que ce projet est sur la table depuis quelques temps déjà!

Puis viendra le neuvième spectacle de Noël de la compagnie, en décembre, La la la c'est Noël. C'est chaque fois un exercice de style, un entraînement que de donner forme à une matière somme toute réduite tout en tentant de préserver un niveau comique important. Le cadre est bien établi.

À l'hiver 2017, je reviens, pour une neuvième fois, au Théâtre Mic Mac pour piloter leur production majeure, Jouliks, un texte de Marie-Christine Lê-Huu. Comme un retour à la maison... si on peut dire. Un texte touchant, percutant que j'ai en main depuis quelques semaines permettant d'enclencher la réflexion. La première est prévue pour le début avril. 

Quelques jours plus tard sera aussi la première de la troupe Les Mal-Avenants du Cégep de Chicoutimi (qui seront en répétition à compter de la semaine prochaine) où j'ai été nommé metteur en scène. Un travail exploratoire à venir pour ces jeunes, un plaisir pour moi. L'oeuvre au programme reste à choisir... selon le nombre de participants.

Enfin, ce sera la 19ième production estivale du Théâtre 100 Masques. Pour l'occasion, nous reviendrons à un genre que j'apprécie: le théâtre de Boulevard. Le dévolu a été jeté sur Feydeau et l'un de ses premiers textes: Le Système Ribadier

Une année artistiquement chargée. C'est beaucoup, c'est vrai. Mais c'est un calendrier qui m'est relativement habituel et avec lequel je connais, d'expérience, les temps et énergies qu'il demande. Puis tout ces projets ne sont pas des one-man-show... chacun réunissant des équipes au sein d'organismes bien huilés. 

Puis viendront les vacances...